Demain Le Grand Soir
NI DIEU, NI MAITRE, NI CHARLIE !

Le Site de Demain le Grand Soir est issu de l’émission hebdomadaire sur "Radio Béton", qui fut par le passé d’informations et de débats libertaires. L’émission s’étant désormais autonomisée (inféodé à un attelage populiste UCL37 (tendance beaufs-misogynes-virilistes-alcooliques)/gilets jaunes/sociaux-démocrates ) et, malgré la demande des anciens adhérent-es de l’association, a conservé et usurpé le nom DLGS. Heureusement, le site continue son chemin libertaire...

Le site a été attaqué et détruit par des pirates les 29 et 30 septembre 2014 au lendemain de la publication de l’avis de dissolution du groupe fasciste "Vox Populi".

Il renaît ce mardi 27 octobre 2014 de ses cendres.

" En devenant anarchistes, nous déclarons la guerre à tout ce flot de tromperie, de ruse, d’exploitation, de dépravation, de vice, d’inégalité en un mot - qu’elles ont déversé dans les coeurs de nous tous. Nous déclarons la guerre à leur manière d’agir, à leur manière de penser. Le gouverné, le trompé, l’exploité, et ainsi de suite, blessent avant tout nos sentiments d’égalité.
(....)Une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise - une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, contre le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte c’est la vie d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais. "

Piotr Kropotkine -

Stratégie du chaos : quand les partisans de Collon sèment le brun dans la CGT
Article mis en ligne le 26 février 2013

par siksatnam

Le numéro de novembre-décembre 2012 du journal « la Fédération » (publication destinée aux syndiqués de la Fédération CGT des salariés des activités postales et de télécommunications) faisait la promotion, en « 4eme de couverture », du livre « La stratégie du chaos », de Michel Collon et Grégoire Lalieu, aux éditions Investig’action et Couleurs Livres.

Le propos de Michel Collon est classique, classique d’une certaine
extrême-droite, qui s’est illustrée ces dernières années dans la défense
des dictatures ou le soutien à la liberté d’expression des négationnistes,
sous couvert de rébellion contre « la pensée unique » ou d’ « 
anti-impérialisme ». Collon s’auto-proclame journaliste, mais a surtout
joué ces derniers temps les supplétifs des propagandistes du régime
d’Assad ou de Kadhafi. On l’a trouvé dans des manifs prétendûment
anti-guerre, aux côtés de négationnistes notoires comme les membres de
l’association Entre La Plume et l’Enclume.

Evidemment nous avons été quelques-uns à tomber des nues et à chercher
pendant plusieurs semaines comment la promotion d’un auteur tel que Collon

avait pu se retrouver dans un journal syndical diffusé à des dizaines de
milliers d’exemplaires.

La réponse est venue dans un compte-rendu de la dernière Commission
exécutive de la Fédé en question, où l’on trouve l’intervention suivante
de Christian Mathorel, responsable CGT à France Telecom, intervention qui
n’a manifestement donné lieu à aucune réaction.
« Sur la guerre au Mali, je partage ce qui a été dit et je pense que l’on
a besoin d’un éclairage pour nous et pour les salariés sur la réalité de
la situation.
Il y a par exemple un livre que l’on a proposé dans le journal fédéral du
mois dernier qu’il faut absolument que vous lisiez et qui peut aider à
comprendre ce qui se passe. C’est « la stratégie du chaos » de Michel
Collon (qui anime également un site internet très instructif « investig
action ») et qui explique toute l’histoire et l’actualité de
l’impérialisme, sa stratégie et sa logique au moyen Orient et en
Afrique, le renforcement des tensions et des enjeux avec l’arrivée dans le
jeu des acteurs (USA, France, Grande Bretagne) de La Chine….. Je pense
qu’il faut lire ce livre qui commence d’ailleurs par : « Ce n’est pas à la
télé que vous aurez les vrais informations qui vous permettrons de vous
faire votre propre idée sur ce qui se passe réellement au Moyen Orient et
en Afrique ».

Si la promotion du livre de Collon dans le journal de la Fédération est
sans doute l’initiative donnant le plus large écho à un « homme passerelle
 » entre l’extrême-gauche et l’extrême-droite, la CGT en a connu d’autres.
Pierre Cassen, fondateur de Riposte Laïque était ainsi syndiqué de la
Filpac, la Fédération du livre, jusqu’à son exclusion en juin 2011, soit
plusieurs années après la dérive fasciste de Riposte Laïque, et même plus
d’un an après sa participation officielle à l’Apéro Saucisson Pinard avec
des organisations violentes d’extrême-droite comme le Bloc Identitaire.

La réaction de la direction de la CGT à l’époque aura été si lente que
Pierre Cassen, aura pu, en janvier 2011, en mettant en avant son propre
statut de militant de la CGT, donner la parole à Fabien Engelmann,
secrétaire d’un syndicat d’employés de la fonction publique territoriale,
candidat du FN et finalement exclu par sa fédération syndicale.

Faudra-t-il attendre que les militants diffusant la propagande de Collon
au sein de leur syndicat s’affilient nommément à un parti fasciste pour
que la CGT réagisse ?
Faire la promotion d’un auteur qui défend Dieudonné, qui a participé avec
des fascistes notoires comme Meyssan à l’Axis for Peace, qui a co-signé un
livre (Israël , parlons-en) avec le biographe hagiographe de Faurisson ,
Paul-Eric Blanrue ne suffit-il pas ?

En tout cas, Christian Mathoret, figure médiatisée de la CGT du secteur
Telecoms et candidat à la commission exécutive confédérale au prochain
congrès de Toulouse, n’est pas le premier à mettre Michel Collon en avant.

On trouve des liens vers le blog de Michel Collon sur le site de l’Union
syndicale de l’intérim, celui de l’UL de Tourcoing. Plusieurs UL du Pas de
Calais invitaient fin 2011 à une conférence de Michel Collon à Isbergues,
on trouve des reprises de texte de Michel Collon sur le site du syndicat
CGT de l’Hôpital de Vienne ou de la CGT Randstad…

On trouve des militants CGT partageant ouvertement les positions de Michel
Collon, c’est par exemple le cas de Jacques Lacaze, secrétaire de l’UL de
Liévin, ex PCF et PRCF
(http://jacques.tourtaux.over-blog.com.over-blog.com/article-jacques-lacaze-secretaire-de-l-union-locale-cgt-de-lievin-62-se-desolidarise-et-condamne-la-decla-99110190.html)

Comment est-il possible que dans une confédération comme la CGT le journal
officiel d’une fédération ou le site internet d’une union locale fasse la
pub de ce type d’ouvrages ?
Poser cette question revient à s’interroger sur les pratiques syndicales
et les analyses qui les sous-tendent. Nul doute que des salariés, et parmi
eux de nombreux syndiqués, trouveront matière à travailler aux réponses de
manière plus précise et concrète.
Cela dit, nous pouvons risquer quelques pistes, sans nier la complexité
des racines d’un tel phénomène ou l’existence de plusieurs niveaux ou
réseaux d’explications.

Il y a d’abord la manière dont fonctionne la CGT et nombre de ses
structures.
Les décisions et informations restent très centralisées, en particulier
dans les structures fédérales. Comme cette centralisation alourdit la
charge de travail des dirigeants syndicaux, il y a une tendance à faire
confiance sur certaines questions et tâches, souvent jugées moins
importantes, à des militants sans forcément en savoir très long sur leurs
convictions réelles, leurs pratiques, leurs engagements.
Idem sur les candidatures à de hautes responsabilités : les délégués
votent dans la majeure partie des cas pour des camarades dont ils ne
connaissent rien ou pas grand-chose. On peut donc tomber sur le meilleur
comme sur le pire.

Les sites d’une union locale ou d’un syndicat ou sa page facebook
d’ailleurs sont souvent animés par une seule personne, et personne d’autre
n’a le temps ou ne voit l’importance d’une réflexion collective sur le
contenu…

Bref, quelques militants bien formés et organisés en réseau n’auront guère
de difficultés à imposer leurs thématiques et à faire la promotion d’une
tendance politique ou d’une autre, surtout lorsqu’il s’agit du champ
para-syndical, des questions sociétales ou internationales, que le salarié
investi à fond sur les luttes de classe n’aura pas le temps de creuser. Et
aujourd’hui, avec la montée en puissance d’une mouvance politique
rouge-brune, il n’est au fond pas étonnant qu’une offensive de leur part
touche la CGT.

Pourquoi ce discours rouge-brun passe ? On peut trouver des éléments de
réponse dans la manière dont le fascisme est appréhendé par la CGT. Il est
indéniable que la volonté existe de combattre l’extrême-droite, le
racisme, les discriminations…

Mais les impulsions données sont souvent très vagues, peu concrètes. Et
autant la lutte contre le racisme, le sexisme et l’homophobie existe, du
moins pour l’affichage de façade confédéral, autant la CGT est
relativement muette sur l’antisémitisme, et peut publier dans son
bimensuel un article sur Auschwitz sans écrire une seule fois les mots « 
Juifs » ou « antisémitisme »…
Sur l’histoire et la mémoire, du travail est fait, en particulier dans les
instituts d’histoire sociale, mais les périodes peu glorieuses de la CGT
ont tendance à ne pas être creusées. On met en avant la partie de la
direction confédérale qui a résisté sous le régime de Vichy et
l’Occupation, mais on se pose nettement moins la question de savoir
comment un dirigeant CGT de premier plan est devenu Ministre du Travail de
Pétain . On informe sur le 17 octobre 1961 ces dernières années (ce qui
est une bonne chose), mais en passant plus que vite sur la faiblesse des
réactions syndicales au lendemain de l’évènement.
On trouve des responsables syndicaux démunis face à des militants faisant
part d’opinions racistes, nationalistes, xénophobes ou antisémites… Ce
n’est pas une généralité, ça dépend vraiment « sur qui on tombe », et de
nombreux militants combattent au quotidien les manifestations du
phénomène, mais souvent individuellement, sans vision d’ensemble ou sans
pouvoir en débattre collectivement dans leurs structures.

La formation politique, autrefois bien souvent assurée, avec tous les
défauts qu’on peut y trouver, par le PCF, est largement insuffisante
aujourd’hui, pour ne pas dire parfois inexistante (manque de temps ou de
moyens d’un côté, volonté de contrôle des bureaucraties à qui ça
convient…). En conséquence, nombre d’infos et de débats n’atteignent pas
l’ensemble des syndiqués ni mêmes des syndicats ou sections
syndicales.

Par ailleurs, la réflexion confédérale de la CGT (et la plupart des
syndicats ne sont pas allés plus loin non plus) n’a porté que sur le FN,
au moment de l’affaire Engelmann ou au moment d’élections politiques.
L’exclusion du leader de Riposte Laique est restée confidentielle et n’a
été rendue publique par son syndicat qu’un an après, parce que Cassen se
vantait (comme un syndicaliste de FO également militant de Riposte Laïque)
d’avoir claqué la porte de lui-même.
Et sur l’affaire Engelmann, l’analyse courante, c’est de voir ça comme un
« noyautage » par le FN, donc comme la stratégie d’éléments extérieurs au
syndicalisme, quant il s’agit au contraire du glissement de syndicalistes
vers l’extrême-droite, glissement facilité par le nationalisme économique
que portent une partie des dirigeants CGT (et de l’extrême-gauche en
général) et par des visions et pratiques syndicales fréquemment en
décalage avec les réalités sociales et économiques des dernières
décennies.

Il existe donc des syndiqués de base tout comme des dirigeants qui
adhèrent à des thèses d’extrême-droite. On le dit peu mais il n’y a pas
que la section syndicale de Fabien Engelmann qui penchait ou penche
toujours pour le FN.

De plus, il ne suffit pas d’afficher son opposition au FN ou aux fascistes
en général, encore faut-il aussi combattre les idées de cette
extrême-droite MEME quand elles n’émanent pas de ce qui est déjà étiqueté
extrême-droite officielle.

Car des militants comme Collon savent bien utiliser les failles du corpus
idéologique de la gauche et de l’extrême-gauche.
Malheureusement, il suffit souvent de mettre en avant quelques concepts
bien vus et jamais questionnés pour faire passer la pire propagande
fasciste.

Ainsi, il suffit d’en appeler à l’ « anti-impérialisme » et à la lutte « 
contre les guerres occidentales », pour faire passer un appel à une
manifestation où seront présents les soutiens des dictatures et des
négationnistes. Or l’anti-impérialisme en France, depuis des années n’est
le plus souvent que l’autre nom du soutien aux pires régimes autoritaires.
Ainsi, il suffit de taper sur Israel et de se déclarer « antisioniste »
pour avoir un succès fou chez les lecteurs de gauche avec un bouquin où
l’on a va entre autres donner de la place à un Paul Eric Blanrue,
hagiographe du négationniste Faurisson et par ailleurs lié à
l’extrême-droite depuis sa prime jeunesse.Or l’ « antisionisme » en France
depuis des années n’est que l’autre nom de l’antisémitisme, utilisé par
des tendances politiques qui n’ont jamais aucun problème avec les autres
nationalismes, bien au contraire

Ainsi il n’est pas très compliqué de faire passer les pires discours
nationalistes et chauvins sous couvert de la défense de « nos » emplois et
de « nos » entreprises face à la vilaine mondialisation.
Ainsi, le corporatisme, au sens d’identité des intérêts du patronat et des
salariés, se fraye un chemin au travers du discours sur les petites
entreprises, où le patron « travaillerait » autant que ses employés et
serait lui aussi victime des grosses entreprises.

L’égalité est une valeur progressiste de base, on le voit a contrario à la
vigueur des mobilisations réactionnaires ou fascistes contre le mariage
pour tous ou le droit de vote des étrangers. Mais l’égalité et la
solidarité de classe sont une bataille exigeante au quotidien, et elle
n’est pas toujours menée : des syndicats refusent l’adhésion de
sous-traitants ou ignorent les précaires présents en nombre
conséquent, depuis des années et de manière permanente dans l’entreprise.
Les "blagues" ou lieux communs à fond raciste, antisémite, sexiste ou
homophobe sont loin d’être relevés systématiquement.

Trop souvent, l’activité syndicale se résume à deux champs complètement
séparés :
d’un côté la défense des droits au quotidien, et l’activité de lutte de
classe qui absorbe évidemment le temps et l’énergie de beaucoup de
militants. De l’autre côté, l’activité d’ « élargissement » sur des
questions de fond plus globales, qui se résume bien souvent au vote de
motions de « soutien » à telle ou telle position politique sur tel ou tel
sujet d’actualité, à l’investissement dans une publication syndicale ou
dans telle association dépendant de l’organisation syndicale.

Bien souvent, ces activités là sont squattées par des militants politiques
dont l’investissement dans la CGT est avant tout conçu comme un moyen
d’influencer le syndicat dans le sens des positions spécifiques de leurs
organisations. Ils utilisent tous les outils possibles à cet effet (sites
internet, journaux, listes mails), puisqu’ils ont le temps de le faire,
ces militants étant rarement investis en même temps sur le champ des
luttes dans sa boite ou son quartier.

Les militants du PRCF et de toutes les autres petites boutiques par
ailleurs liées aux fascistes comme Collon ou Jean Bricmont sont bien dans
cette logique mûrie et réfléchie depuis de longues années. Ils savent au
mieux profiter des moyens de la CGT.

Mais leur exclusion, nécessaire si l’on a un minimum de cohérence
politique, ne suffira pas à régler le problème.

A un moment donné, c’est à chaque syndicaliste, à chaque structure de base
de comprendre que des luttes comme l’antifascisme ou la solidarité
internationale, sont des points d’appui très forts pour aller vers cette « 
transformation sociale » que revendique officiellement la CGT.

Mais l’antifascisme et la solidarité internationale ne se font pas, dans le
syndicat, par des déclarations de principe, mais par des actions concrètes
et des discours clairs qui permettent à chacun de se saisir des enjeux et
qui n’offrent pas de prise aux idées fascistes.

Ainsi sur le Mali, rien n’interdit aux syndicats qui se sentent concernés
d’agir concrètement notamment en soutenant la lutte des travailleurs sans
papiers présents ici, en relayant les mouvements sociaux importants de
ces derniers mois, notamment dans l’enseignement, ou en lançant des
campagnes de pressions sur nos gouvernements pour obtenir que des fonds
soient enfin débloqués pour faire barrage à la famine qui ravage le Sahel
aussi gravement que les groupes intégristes.

Une dernière chose : nous savons d’emblée que des camarades nous
reprocheront à la fois d’avoir mis ce débat sur la place publique et de
rester anonymes.

Sur le premier point, les affaires Cassen et Engelmann et la manière dont
elles ont été traitées nous a suffisamment instruits : nous savons bien
qu’en vertu d’une certaine culture du consensus, jointe à la peur de « 
créer du conflit et d’affaiblir nos structures alors qu’il y a des
priorités », la passivité reste malheureusement de rigueur tant qu’il n’y
a pas le feu au lac, c’est à dire tant que les débats ne sortent pas du
niveau interne.

Sur le second point, malheureusement, nous sommes aussi très réalistes sur
le rapport de forces entre nous et la tendance rouge-brune au sein de la
CGT : nous savons que nous nous attaquons à des militants organisés, avec
des moyens de nuisance nombreux et bien installés dans la structure
syndicale. Nous savons aussi que ces militants se moquent éperdument de la
lutte des classes, du quotidien syndical et seront prêts à tout mettre en
œuvre pour écraser les salariés syndiqués qui se mettent en face d’eux,
sans évidemment tenir aucun compte de l’importance de leur activité de
lutte quotidienne. Or nous ne sommes « que » cela, des militants
syndicaux ayant fait le choix de rester des salariés comme les autres.

La CGT n’hésite pas à revendiquer les responsabilités particulières que
lui confère sa place de 1ère organisation syndicale. Nous verrons comment
elle les assume face à la montée de l’extrême-droite et à la contamination
et la propagande en son sein d’idéologies fascistes.

Des salariés syndiqués CGT