Demain Le Grand Soir
NI DIEU, NI MAITRE, NI CHARLIE !

Le Site de Demain le Grand Soir est issu de l’émission hebdomadaire sur "Radio Béton", qui fut par le passé d’informations et de débats libertaires. L’émission s’étant désormais autonomisée (inféodé à un attelage populiste UCL37 (tendance beaufs-misogynes-virilistes-alcooliques)/gilets jaunes/sociaux-démocrates ) et, malgré la demande des anciens adhérent-es de l’association, a conservé et usurpé le nom DLGS. Heureusement, le site continue son chemin libertaire...

Le site a été attaqué et détruit par des pirates les 29 et 30 septembre 2014 au lendemain de la publication de l’avis de dissolution du groupe fasciste "Vox Populi".

Il renaît ce mardi 27 octobre 2014 de ses cendres.

" En devenant anarchistes, nous déclarons la guerre à tout ce flot de tromperie, de ruse, d’exploitation, de dépravation, de vice, d’inégalité en un mot - qu’elles ont déversé dans les coeurs de nous tous. Nous déclarons la guerre à leur manière d’agir, à leur manière de penser. Le gouverné, le trompé, l’exploité, et ainsi de suite, blessent avant tout nos sentiments d’égalité.
(....)Une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise - une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, contre le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte c’est la vie d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais. "

Piotr Kropotkine -

Un 1er mai confiné…
Article mis en ligne le 1er mai 2021
dernière modification le 9 avril 2021

par siksatnam

Un 1er mai où nous ne sommes pas dans la rue… Nous manquons les chants, les merguez et la mauvaise musique de sono, mais ce que nous perdons surtout aujourd’hui c’est l’occasion de manifester dans les rues, sous les fenêtres, les raisons actuelles et historiques de s’élever contre le travail et le capital qui le porte. Nul doute que les médias et la presse, eux, soumis qu’ils sont aux directives de l’État et du patronat, seront opérationnels pour relayer le discours des premiers de cordée sur la « traditionnelle fête du travail ». Pourtant le 1er mai n’est pas la fête du muguet ; le 1er mai est et restera la journée internationale de luttes des travailleurs et des travailleuses, des exploités.

Une fête, le 1er mai ?

Certainement pas. Pour nous, anarchistes, il s’agit avant tout d’une journée de commémoration, de deuil. Nos drapeaux noirs portent la souffrance fondatrice des syndicalistes arrêtés arbitrairement, à la fin d’une manifestation pour la journée de huit heures ayant été fortement réprimée par la police, sur Haymarket Square, à Chicago, en 1886. Condamnés à mort pour l’exemple, pour un attentat qu’ils n’ont pas commis (à savoir l’explosion d’une bombe artisanale au milieu de policiers en faction), quatre d’entre eux – Parsons, Engel, Spies et Fischer – sont pendus, tandis qu’un dernier – Lingg – se suicide dans sa cellule. Sans leur rendre aucun culte, nous les considérons comme des symboles du combat contre le salariat, et nous souhaitons par conséquent honorer leur héritage en faisant de ce jour un moteur des luttes sociales, de l’auto-organisation des opprimés et des alternatives révolutionnaires.

La journée des travailleurs et des travailleuses

L’an dernier, à la même date, Emmanuel Marcon s’exprimait en ces termes : « Le 1er mai est la fête de toutes celles et ceux qui aiment le travail, le chérissent, parce qu’ils produisent, parce qu’ils forment, parce qu’ils savent que par le travail nous construisons l’avenir. Merci de porter ces valeurs et d’œuvrer chaque jour pour notre nation. » Non ! Le 1er mai n’est pas le jour de celles et ceux qui aiment le travail et le salariat, qui défendent la nation. En félicitant « ceux qui aiment le travail, le chérissent », le chef de l’État s’engage dans le sillage de Pétain qui, en 1941, avait rebaptisé le 1er mai « Fête du Travail et de la Concorde sociale », avec pour unique objectif d’occulter les antagonismes de classes. Hier, comme aujourd’hui, ne laissons personne se réapproprier nos luttes. Ce n’est pas parce que nous sommes confinés que nous ne ferons pas entendre nos voix.

Gestion étatique de la pandémie

La situation sanitaire mondiale exceptionnelle que nous traversons, et la façon dont elle est gérée par les gouvernants de tous les pays, ne font qu’accentuer les raisons de lutter. Le virus du covid-19 amplifie les travers, les dominations, les oppressions, contre lesquelles nous n’avons de cesse de nous élever. La pandémie et sa gestion accentuent les inégalités au point qu’elles deviennent visibles même à celles et ceux qui n’exercent pas d’habitude un regard critique sur la société.

L’État, en refusant d’arrêter la machine économique, en refusant d’arrêter la machine électorale, en laissant se dérouler un match de foot (à Lyon par exemple), démontre bien ses priorités, son utilité pour le bien du capital, des possédants, du patronat, pour le bien de la démocratie représentative et de sa propre existence. Il y a des raisons politico-financières qui dépassent la raison du bien commun, de la santé de l’ensemble de la population. Pour eux protéger l’économie est toujours plus urgent que de sauver des vies.

Travailler dans le médico-social

Rien de bien surprenant lorsqu’on se souvient qu’il y a quelques mois seulement, les chiens de garde de l’État gazaient les personnels du secteur médico-social qui réclamaient pourtant les moyens d’exercer dignement leurs métiers. C’est le même personnel qui aujourd’hui est érigé en héro de la nation et que nous sommes invités à applaudir à 20h !

Pourtant, un système de santé solide a-t-il besoin d’héroïsme et de sacrifices ? Depuis 40 ans, l’État libéral orchestre d’une main de maître le sort de ses salariés (et plus largement de sa population). Les gouvernements successifs ont participé à la destruction du bien collectif, public, de la santé. Suppression de lits, en particulier en réanimation, instauration du numérus clausus dans les universités de médecine, partenariats public-privé pour construire ou rénover les hôpitaux, tarification à l’acte, etc. L’hôpital doit être rentable et non social.

Et que dire des salariées des EHPADs ? En lutte depuis des années, ils et elles n’ont eu droit qu’au mépris, des politiques, des gestionnaires. Le manque de moyens était déjà criant dans les établissements, la pandémie, n’a fait là encore que l’accentuer… Et ce au prix de la vie des salariées et des résidants. Vieilles,vieux, infirmières, infirmiers, aides-soignantes, éducateurs, toutes et tous ont droit au même mépris. Applaudissements et primes exceptionnelles ? C’est une revalorisation générale des salaires et des conditions de travail que nous réclamons !

Travailler « en seconde ligne »

Les exploités du privé ne sont pas dans une situation plus enviable. Les méprisés du bas de l’échelle sociale (éboueurs, caissières et caissiers, femme et homme de ménage et tant d’autres) sont là aussi élevés en héros de la nation. Des héros payés au smic… pas cher payé le sacrifice ! En cette période de crise, nous ne pouvons plus fermer les yeux : pourquoi celles et ceux qui produisent le travail le plus « utile » sont-ils le moins payés ? Parce que les salaires ne rétribuent pas les tâches exécutées mais sont inversement proportionnels aux bénéfices du patronat. Le salariat obéit à la logique du profit et non à celle de l’utilité sociale. Aujourd’hui nous ne fêtons pas ces heures de labeur et de domination ; nous exigeons notre dû, nous exigeons d’autres conditions !

Et l’État créa le télétravail

Les travailleurs et les travailleuses confiné.e.s ne sont pas en reste. Cadres et employés, fonctionnaires ou indépendants voient s’inviter la sphère professionnelle jusque dans leur intimité. Il faut continuer à travailler, coûte que coûte, le soir, la nuit, rivés aux ordinateurs et aux téléphones. Souvent pour faire ce qui devra être détricoté le lendemain suite aux annonces ministérielles en cascades. Travail inutile, chronophage, invasif, anxiogène, qui transforme les habitations en espaces de labeur. Pour concilier travail et vie de famille il faut faire des concessions sur les horaires, pour compenser la distance il faut en faire deux fois plus. À n’en pas douter les employeurs, l’État et les chefs d’entreprises, sauront rappeler à leurs employés qu’ils ont su être « flexibles » et efficaces.

Direction la sortie

On entend, on lit, on voit déjà le patronat et son bras droit, l’État, nous préparer à être encore plus exploités à la sortie de cette pandémie. Le MEDEF et le gouvernement en appellent à nouveau à notre esprit de sacrifice, à notre sens de la nation pour redresser l’économie, car n’en doutons pas, les pouvoirs politiques et économiques comptent bien nous faire payer cette pandémie ! Augmentation du temps de travail, diminution des congés payés, toutes les pistes leur permettant de nous soumettre, de nous oppresser encore plus qu’aujourd’hui sont étudiées ! Il s’agit d’exercer une pression morale pour que nous revenions de nous-mêmes à leur service, mais aussi peut-être afin de nous empêcher de penser à leur incompétence et plus généralement à leur inutilité. Ils n’hésiteront pas non plus à élargir et amplifier la société de contrôle qui se met en place, ici et un peu partout dans le monde !

Leur stratégie du choc, la manipulation de nos peurs et des ressorts de nos consciences fonctionnera, sauf si nous décidons de nous organiser, comme l’ont fait les anciens et les anciennes qui ont durement lutté, qui se sont organisés pour la réduction du temps de travail, contre le travail des enfants, pour les congés payés, etc.

Et nous ne devrions pas, selon nous, juste vouloir limiter la casse, nous ne devrions pas travailler à conserver l’état actuel du salariat, non, nous devons militer et lutter pour aller plus loin, reprendre les outils de production et de décision collectivement en main. Nous devons dès maintenant dessiner un monde désirable afin de ne pas être pris au dépourvu le moment venu, afin de surprendre aussi les gouvernants qui comptent sur notre stupeur pour rétablir l’ordre du marché. Ne nous asservissons plus au travail, œuvrons par et pour nous-mêmes.

Ici et ailleurs

Étant anarchistes et donc internationalistes, nous ne pouvons pas porter nos regards et nos critiques sur l’horizon hexagonal uniquement. Et notre solidarité, elle aussi est internationale ! Les répercussions de la pandémie mondiale se font sentir sur toutes celles et ceux qui sont sous le joug du salariat à travers le monde.

Nous sommes solidaires des travailleuses du textile, se comptant par millions au Bangladesh, au Cambodge et ailleurs, petites mains exploitées des marques internationales. Elles se retrouvent sans rien en raison de la fermeture des usines ! Sans emploi, sans salaire, sans chômage, alors même que les marques pour qui elles travaillent (souvent en sous-traitance) font des bénéfices se comptant en milliards et gavent leurs actionnaires !

Notre solidarité va aussi avec les travailleurs et travailleuses américaines qui n’ont pas hésité à se mettre en grève pour demander des protections sanitaires et sociales ! D’autres, se comptant par millions, ont perdu leurs emplois et se retrouvent là aussi sans chômage, sans couverture santé !

Nous sommes solidaires de toutes celles et tous ceux qui, à travers le globe, subissent la violence du capitalisme, la violence des États, la violence du patronat. Nous savons bien que ces dernières ne sont pas nées avec la pandémie mondiale et nous continuerons d’œuvrer pour que toutes ces structures de pouvoir et d’oppressions disparaissent à jamais, pendant et après la pandémie comme nous le faisions avant ! Nous continuerons de semer des graines d’anarchie ! Nous savons être inventifs pour continuer nos luttes !

Cette année plus encore qu’à l’habitude, réapproprions-nous le 1er mai ! Faisons-en la journée de toutes les luttes justes, le point d’impulsion d’actions diverses et radicales pour renverser ce monde déjà bien vieux. Réalisons l’impossible, prenons tout, détruisons toutes les formes de pouvoir (politique, économique, symbolique). Œuvrons pour nous-mêmes, et nous ne travaillerons plus jamais !

Ni patrie, ni patron ! Ni dieu, ni maitre !

Que vive l’anarchie !