Demain Le Grand Soir
NI DIEU, NI MAITRE, NI CHARLIE !

Le Site de Demain le Grand Soir est issu de l’émission hebdomadaire sur "Radio Béton", qui fut par le passé d’informations et de débats libertaires. L’émission s’étant désormais autonomisée (inféodé à un attelage populiste UCL37 (tendance beaufs-misogynes-virilistes-alcooliques)/gilets jaunes/sociaux-démocrates ) et, malgré la demande des anciens adhérent-es de l’association, a conservé et usurpé le nom DLGS. Heureusement, le site continue son chemin libertaire...

Le site a été attaqué et détruit par des pirates les 29 et 30 septembre 2014 au lendemain de la publication de l’avis de dissolution du groupe fasciste "Vox Populi".

Il renaît ce mardi 27 octobre 2014 de ses cendres.

" En devenant anarchistes, nous déclarons la guerre à tout ce flot de tromperie, de ruse, d’exploitation, de dépravation, de vice, d’inégalité en un mot - qu’elles ont déversé dans les coeurs de nous tous. Nous déclarons la guerre à leur manière d’agir, à leur manière de penser. Le gouverné, le trompé, l’exploité, et ainsi de suite, blessent avant tout nos sentiments d’égalité.
(....)Une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise - une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, contre le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte c’est la vie d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais. "

Piotr Kropotkine -

QU’A FAIT JULIAN ASSANGE ?
Article mis en ligne le 19 novembre 2021
dernière modification le 2 novembre 2021

par siksatnam

En résumant brièvement, ce qui a provoqué la foudre des États-Unis contre Julian Assange tient en quelques points essentiels :

La fondation de WikiLeaks en 2006, outil de publication en ligne, qui a permis notamment aux « lanceurs d’alerte » dont les révélations ont un intérêt public de faire fuiter des documents secrets en protégeant leur identité par un système de cryptage des données.

Suivant un principe cher aux Cypherpunks, Julian Assange a opposé la « transparence des États » à la « vie privée des citoyens » et voulait exposer les premiers et protéger les seconds en faisant de la cryptographie un « fondement de la liberté et de la démocratie ».

WikiLeaks a révélé en 15 ans plus de 10 millions de documents, dont le contenu n’a pas été réfuté, touchant différents régimes dans le monde sans distinction (avec un rôle déterminant dans les « Printemps arabes », par exemple, ou encore le système de surveillance de la population russe par ses gouvernants). Mais ce sont les documents concernant les crimes de guerres des États-Unis, après les révélations de Chelsea Manning sur les guerres en Irak et en Afghanistan (15 000 morts non signalés en Irak, assassinats de civils, usage de la torture à Guantanamo, etc.) qui ont déclenché la traque de Julian Assange, la campagne de propagande (provisoirement réussie) pour la « destruction de son image » et son refuge dans l’ambassade équatorienne à Londres pendant 7 ans, où il a été espionné jusque dans les toilettes. Ses avocats, ses visiteurs et ses défenseurs ont aussi été espionnés. Il est désormais confirmé que la CIA avait aussi envisagé de l’assassiner ou de le kidnapper, avant de finalement obtenir son enlèvement par la police britannique au sein même de l’ambassade, le 11 avril 2019. À cette occasion, les documents et disques durs concernant sa stratégie de défense ont été volés.

WikiLeaks a publié, entre autres, des documents prouvant comment l’administration des États-Unis a espionné ses alliés (dont les gouvernants britanniques, allemands et français, le secrétaire général des Nations unies, etc.) et massivement ses propres citoyens par tous les moyens (ordinateurs, smartphones, téléviseurs connectés, jusqu’aux messageries cryptées). WikiLeaks a montré en détail comment des ententes illégales entre les gouvernements et des multinationales nuisaient au bien commun, niant les principes démocratiques, notamment dans les traités internationaux, les évasions fiscales, les crimes écologiques, la traque des militants, des dissidents et même des journalistes… WikiLeaks a révélé des malversations dans la désignation de la candidate démocrate Hillary Clinton (face à Bernie Sanders), ce qui a poussé de nombreux commentateurs à accuser Assange d’avoir contribué à l’élection de Trump, lui reprochant de ne pas avoir caché la vérité sur les agissements de la secrétaire d’État candidate.

WikiLeaks a fourni de précieuses informations à la presse internationale démunie face au désintérêt de ses lecteurs et à la perte de moyens pour enquêter sur la durée. Julian Assange a été sacré « Homme de l’année » par la rédaction du Monde en 2010 où il faisait aussi la « une » du Time. Les publications permises par la persévérance de Julian Assange constituent à ce jour les plus importantes révélations de l’histoire du journalisme.

En résumé, ce que Washington reproche à Julian Assange est d’avoir révélé la vérité sur les agissements des États-Unis dans le monde, ce qui leur est insupportable.

­DE L’ACCUSATION DE CRIME SEXUEL A CELUI D’ESPIONNAGE ­

L’affaire bidon de « viol » en Suède a permis de détruire l’image publique de Julian Assange au moment où WikiLeaks venait de commencer ses révélations les plus médiatisées (celles de Manning, notamment la vidéo Collateral Murder montrant un massacre de civils dont des journalistes par l’Armée des États-Unis en Irak). La confusion sur l’affaire suédoise, longuement entretenue, a eu pour conséquence de démobiliser un grand nombre de soutiens et a poussé Assange à se réfugier pendant près de 7 ans dans l’ambassade équatorienne à Londres dans des conditions difficiles avant d’y être enlevé et jeté dans la prison de haute sécurité de Belmarsh, d’abord pour purger une peine exceptionnelle de 50 semaines pour le délit mineur de « rupture de bracelet électronique ». Le 19 novembre 2019, Assange a finalement été innocenté dans l’accusation de « crime sexuel » classée sans suite, neuf ans après les faits reprochés et un lourd sacrifice… mais cela n’a rien changé. Le temps était passé, l’actualité aussi et l’image de Julian Assange n’a pas été massivement réhabilitée pour autant. Depuis, il est toujours maintenu en détention dans cette prison de haute sécurité, dans des conditions terribles, parmi de grands criminels et terroristes, et ceci par la volonté des gouvernements américains, sous la présidence de Trump et désormais de Biden qui, aussitôt élu, a relancé la procédure d’extradition en appel, au nom de l’Espionage Act, loi intérieure américaine de 1917 créée pour museler les opposants à l’entrée en guerre. Si Julian Assange, en mauvaise santé psychique et physique, est extradé aux États-Unis, il risque 175 ans de prison.

LE PROCÈS EN APPEL­

Les 27 et 28 octobre 2021 avait lieu à Londres, le procès en appel des États-Unis réclamant l’extradition du fondateur de WikiLeaks.

Julian Assange fait face à 18 chefs d’accusation, dont 17 sont des infractions à l’Espionage Act de 1917, loi de plus en plus utilisée par le ministère de la Justice contre les médias qui divulguent des documents « classifiés » ou parlent d’informations sensibles avec des journalistes, même si ce qu’ils révèlent est d’intérêt public. En début d’année, la juge britannique qui avait validé les arguments des États-Unis pour l’extradition de Julian Assange, avait cependant décidé qu’il n’était pas en état d’être extradé vu son état de santé psychique et compte tenu du risque de suicide. Cette « victoire » avait une contrepartie : le refus de l’extradition reposait donc uniquement sur la santé mentale d’Assange. Cela revenait à rejeter tous les arguments de principe en faveur de sa libération et à offrir aux Américains une porte de sortie : donner toutes les garanties pour écarter le risque de suicide. Plus simple que de combattre sur les arguments de fond de l’affaire !

S’attaquant aux évaluations psychologiques des experts afin de relativiser le risque de suicide, les États-Unis sont donc revenus à la charge avec cet appel portant sur la capacité mentale d’Assange à être extradé aux États-Unis, dans la continuité du traitement d’exception et des humiliations dont il est sans cesse victime depuis le début de l’affaire, avec des arguments ignobles sur son degré de dépression après 9 ans d’enfermement dans des espaces réduits, privé de la lumière du jour et d’air frais.

Le débat sur la santé mentale d’Assange au centre de la procédure en appel a propulsé la défense loin des débats de fond. N’ayant eu jusque-là aucun mal à obtenir toutes les faveurs de la justice britannique, les accusateurs américains jouent de toutes les roublardises, promettant désormais, après avoir l’avoir longtemps menacé de mort, après avoir même concrètement projeté de l’enlever ou de l’assassiner, qu’Assange ne risquerait pas grand-chose et serait très bien traité une fois extradé… Quand on voit les conditions de détention des prisonniers politiques dans les prisons américaines, on ne peut pas croire un mot de ces promesses.

La procédure peut encore durer longtemps et si Julian Assange est maintenu en détention dans cette prison de Belmarsh, sa vie est réellement en danger. La mobilisation en soutien à Julian Assange est indispensable pour essayer d’enrayer la machine à broyer et c’est par l’exposition rigoureuse des faits que nous pouvons parvenir à déjouer les stratégies les plus cyniques et désespérantes.