Demain Le Grand Soir
NI DIEU, NI MAITRE, NI CHARLIE !

Le Site de Demain le Grand Soir est issu de l’émission hebdomadaire sur "Radio Béton", qui fut par le passé d’informations et de débats libertaires. L’émission s’étant désormais autonomisée (inféodé à un attelage populiste UCL37 (tendance beaufs-misogynes-virilistes-alcooliques)/gilets jaunes/sociaux-démocrates ) et, malgré la demande des anciens adhérent-es de l’association, a conservé et usurpé le nom DLGS. Heureusement, le site continue son chemin libertaire...

Le site a été attaqué et détruit par des pirates les 29 et 30 septembre 2014 au lendemain de la publication de l’avis de dissolution du groupe fasciste "Vox Populi".

Il renaît ce mardi 27 octobre 2014 de ses cendres.

" En devenant anarchistes, nous déclarons la guerre à tout ce flot de tromperie, de ruse, d’exploitation, de dépravation, de vice, d’inégalité en un mot - qu’elles ont déversé dans les coeurs de nous tous. Nous déclarons la guerre à leur manière d’agir, à leur manière de penser. Le gouverné, le trompé, l’exploité, et ainsi de suite, blessent avant tout nos sentiments d’égalité.
(....)Une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise - une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, contre le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte c’est la vie d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais. "

Piotr Kropotkine -

Propagande russe : les nazis omniprésents de Poutine
Article mis en ligne le 3 juin 2022
dernière modification le 31 mai 2022

par siksatnam

La propagande est compagne omniprésente des guerres. D’ailleurs la propagande orientée vers un autre pays EST DÉJÀ une forme de guerre. La Russie a installé une véritable machine de guerre depuis des années concernant cette dite propagande, et elle ne fait que se renforcer depuis le début de la guerre en Ukraine et ce particulièrement en Afrique.

Et pour ceux qui suivent cette crise gravissime, un des éléments étonnants de celle-ci est la répétition en boucle du maître du Kremlin, mais aussi de son gouvernement, de ses oligarques, mais aussi bien entendu de ses relais médiatiques de l’accusation lancée à ses opposants d’être nazis.

Comme un mantra, les têtes parlantes de la télévision d’État font référence à la Seconde Guerre mondiale, invoquant l’esprit d’une lutte contre le nazisme sans autre raison que de blanchir la dernière saisie de terres en cours par Poutine.

Dans l’émission « Dimanche Soir » de Soloviev (« journaliste » russe hystériquement pro Poutine), la politologue et professeure d’histoire Elena Ponomareva a affirmé :

« Nous luttons non seulement contre l’OTAN, mais aussi contre l’Union européenne nazie. »

Dans une émission de télévision publique « 60 Minutes », le journaliste Andrei Sidorchik a monté le concept en mayonnaise lorsqu’il s’est exclamé :

« Joe Biden est un nazi. Les membres du Congrès américain⁠—démocrates et républicains⁠—sont des nazis… Le chancelier allemand est un nazi… Les dirigeants de l’UE sont des nazis… parce que leurs sanctions tentent de préserver le néonazisme en Ukraine. »

Les médias d’État ont démontré que, dans la Russie de Poutine, quiconque ose s’opposer à Poutine est qualifié de « nazi », au point que le terme est dépourvu de son sens originel.

Cela a commencé par les Ukrainiens, puis les USA, puis l’Europe. A les en croire le monde entier, sauf la Russie serait infesté de nazis, et la mission sacrée de la Russie serait de les éliminer.

C’est tellement caricatural que ca en devient ridicule.

Ce qui est qualifié de « nazi », c’est toute entité, groupe, organisation, état portant ou étant potentiellement en mesure de porter préjudice à la grande fédération de Russie.

C’est une rhétorique foncièrement complotiste et paranoïaque.

Tous nazis !

Le problème, c’est que ca marche, au poins en partie auprès d’une partie de la population, à commencer par les soutiens français de Poutine, mais aussi auprès de la population russe.

Vladimir Poutine affirme avoir envahi l’Ukraine pour « dénazifier » le pays et « protéger les gens » contre « l’intimidation et le génocide ». Les Russes le croient apparemment aussi ; environ 68% pensent que le but de l’invasion est la légitime défense, tandis que 21 % disent qu’elle a à voir avec la dénazification.

Il nous a donc semble intéressant de nous plonger dans ce gloubi boulga d’accusations insensées, afin d’abord de comprendre ce que disait réellement le Kremlin sur ce sujet, mais aussi de comprendre la ligne de propagande russe d’hier à aujourd’hui.

Pourquoi ? Parce que cette logorrhée de propagande du régime poutinien provient à notre sens d’une certaine continuité depuis le régime stalinien. En somme, Poutine prolonge la propagande de Staline à nos jours, ce qui semble assez étonnant au premier abord.

« Il voit des nazis partout » tel pourrait être le titre de cet article… Et on y va !

Il voit des nazis partout !

1)Des nazis oui, mais depuis quand et où ?

Notre premier élément d’enquête sur ce sujet est d’être allé chercher dans la propagande du Kremlin où et quand cette rhétorique est apparue.

a)1939-2014

Remontons au 9 mai 2005. A cette date, la fédération de Russie fête le 60ème anniversaire de la victoire sur l’Allemagne nazie. Poutine prononce un discours dont voici certains points forts :

FACE AU TERRORISME, NE PAS PERMETTRE DE RÉPÉTITION DE GUERRE FROIDE

« Face à la menace réelle aujourd’hui du terrorisme, nous devons rester fidèles à la mémoire de nos pères. Nous avons l’obligation de défendre un monde basé sur la sécurité, la justice et sur une nouvelle culture des relations mutuelles qui ne permettront pas une répétition des guerres froides ou chaudes.

Nous construisons notre politique selon des idéaux de liberté et de démocratie, un droit selon lequel chaque Etat peut lui-même choisir sa voie de développement.

L’exemple fort de cette politique est la réconciliation historique entre la Russie et l’Allemagne. Je considère cela comme un des progrès les plus éminents de l’Europe après-guerre ».

NOUS NOUS SOUVIENDRONS TOUJOURS DE L’AIDE DES ALLIES

« Nous n’avons jamais distingué notre victoire de celle des autres. Et nous nous souviendrons toujours de l’aide des Alliés, les Etats-Unis, la Grande-Bretagne, la France, les autres pays de la coalition anti-hitlérienne, les anti-fascistes italiens et allemands.

Aujourd’hui, nous rendons hommage au courage des Européens qui ont résisté contre le nazisme.

Mais nous savons aussi que l’Union soviétique a perdu pendant ces années-là des dizaines de millions de citoyens ».

L’ARMÉE ROUGE A MIS LE POINT FINAL A LA GUERRE

« L’Armée soviétique a d’abord arrêté les nazis devant Moscou et puis, pendant trois ans, elle a non seulement tenu face à la pression de l’ennemi, mais a pu le repousser en arrière, jusque dans sa tanière.

Par la libération de l’Europe et la lutte pour Berlin, l’Armée rouge a mis le point final victorieux à la guerre ».

PAS D’ALTERNATIVE A NOTRE AMITIÉ

« Je suis convaincu qu’il n’y a pas d’alternative à notre fraternité et à notre amitié. Et avec nos voisins proches et avec tous les pays du monde.

Pour les peuples de l’ex-Union (soviétique), (le 9 mai) reste le jour d’un grand exploit populaire. Et pour les Etats d’Europe et de toute la planète, le jour où le monde a été sauvé ».

Rappelons un peu le contexte de la période 2005 :

Dans une optique réaliste, ces critiques ne doivent pas masquer l’essentiel : par rapport à la période Eltsine, la Russie a retrouvé de véritables marges de manœuvre sur la scène internationale. Même s’il a commis de lourdes fautes, Vladimir Poutine est parvenu, à plusieurs reprises, à renverser des situations délicates en recourant à une dialectique économie/sécurité, en exploitant le « terrorisme international » et en déséquilibrant habilement ses partenaires . Après une annus horribilis en 2004, due notamment aux conséquences internationales de Beslan (Ossétie du Nord) et à la « révolution orange » en Ukraine, la politique étrangère russe présente un bilan 2005 beaucoup plus favorable : la commémoration du 60e anniversaire de fin de la Seconde Guerre mondiale, la signature des feuilles de route avec l’Union européenne (UE) sur les quatre espaces définis à Saint-Pétersbourg, le regain d’influence en Asie centrale à travers l’Organisation de coopération de Shanghai (OCS), les exercices militaires avec la Chine et l’Inde, la tournée au Moyen-Orient et la poursuite d’une politique ambivalente à l’égard de l’Iran, témoignent de l’activisme du Kremlin en matière internationale. Sa capacité de rebond profite des prix énergétiques mondiaux, qui lui procurent des moyens financiers conséquents. En ouvrant 2006 par une crise gazière avec l’Ukraine, le Kremlin a mis en lumière une tendance sous-jacente de sa politique étrangère : l’utilisation de l’approvisionnement énergétique comme révélateur du différentiel de puissance entre la Russie et ses voisins. À la veille de sa première présidence du G8, V. Poutine se sent en position de force, convaincu de la centralité de la « sécurité énergétique » dans les rapports de force internationaux.

On mesure le gouffre qui sépare ce discours et celui d’aujourd’hui. Mais dans ce discours on retrouve une certaine constance du discours russe depuis 1939 :

Ce contentieux est d’autant plus intense que l’URSS a toujours refusé de reconnaître ses torts d’État agresseur dans la période 1939-1941 et, jusqu’en 1989-1991, la réalité même des faits historiques, en particulier l’existence des protocoles secrets des deux traités du 23 août et du 28 septembre 1939. Ainsi, lors de son fameux « rapport secret » devant le XXe congrès du PCUS en février 1956, censé donner le coup d’envoi de la déstalinisation en URSS, Khrouchtchev n’a évoqué à aucun moment le sort des nations baltes, de la Bessarabie et de la Pologne orientale. Il les connaissait pourtant de première main, étant en septembre 1939 le chef de l’Ukraine soviétique à laquelle fut intégrée la plus grande partie de la Pologne orientale. L’essentiel était pourtant connu depuis la publication en 1948 des documents saisis par les Américains dans les archives des Affaires étrangères allemandes en 1945 ainsi que les premières et excellentes synthèses historiques65, auxquelles le camp communiste répondit avec fureur tant en URSS66 qu’en France67, notamment pour nier l’existence des protocoles secrets qui, évidemment, démontraient la complicité des deux régimes totalitaires.

Le contentieux n’était pourtant pas récent, symbolisé par la tristement célèbre affaire de Katyn. En effet, au printemps 1943, l’occupant nazi découvrit un charnier où reposaient les corps de 4.404 officiers polonais assassinés d’une balle dans la tête. Goebbels, le chef de la propagande nazie, s’empara de cette découverte pour lancer le 13 avril 1943 une énorme campagne de propagande stigmatisant la barbarie « judéo-bolchevique ». Dès que l’Armée rouge réoccupa le terrain, Staline ordonna à une commission ad hoc d’attribuer le crime aux nazis. La découverte du massacre envenima très vite les relations entre l’URSS et le gouvernement polonais en exil à Londres, jusqu’à leur rupture. Or, alors qu’il continuait d’attribuer urbi et orbi le crime aux nazis, Khrouchtchev, devenu premier secrétaire du PCUS, ordonna en 1959 au chef du KGB, en toute connaissance de la responsabilité soviétique, de détruire les dossiers de 21 857 Polonais abattus à Katyn et autres lieux68. Ce négationnisme perdura jusqu’en mai 1988 quand, pour la première fois, Mikhaïl Gorbatchev reconnut que le NKVD était responsable du massacre. Il fallut néanmoins attendre le 24 septembre 1992 pour que soit rendu public l’ordre du bureau politique du 5 mars 1940 l’exigeant et que, en octobre 1992, certains documents soient transmis au président polonais Lech Wałęsa, soit cinquante-deux ans plus tard. Depuis, l’ouverture de plus en plus large des archives soviétiques après 1991 a permis aux historiens d’établir les faits, tous les faits. Cependant, en mars 2005, la Russie de Vladimir Poutine a refusé de transmettre à la Pologne 116 volumes d’archives sur les 185 existant, qui furent classés secret. En parallèle, le procureur général militaire Alexandre Savenkov clôturait une instruction d’une dizaine d’années par un non-lieu : il qualifiait l’assassinat de 14.450 officiers polonais de « crime militaire », ce qui faisait jouer la prescription de cinquante ans et évitait de le qualifier de crime contre l’humanité ou de génocide, qui n’aurait pas pu bénéficier de la prescription. En réponse, l’Institut polonais de la mémoire nationale décida d’engager sa propre enquête et le Sénat polonais vota un texte demandant aux Russes de déclassifier les archives et de qualifier le crime de génocide.

Sur le plan politique, l’entrée dans l’Union européenne de la plupart des ex-« démocraties populaires » et des trois ex-républiques soviétiques baltes a liquidé les séquelles de l’alliance soviéto-nazie. Les frontières de ces États sont aujourd’hui garanties par leur appartenance à l’Union européenne, même si la Russie ne cesse de les harceler, par exemple par des attaques de hackers sur leurs systèmes informatiques. Demeurent néanmoins pendantes les questions de la Moldavie, ex-Bessarabie roumaine, parasitée par la pseudo-république de Transnistrie, et surtout de l’Ukraine depuis que Vladimir Poutine, déchirant les traités internationaux, a annexé la Crimée à la Russie en mars 2014, puis déclenché en avril de la même année, dans le Donbass, une guerre secrète qui dure encore.

En revanche, les mémoires collectives sont loin d’être réunifiées et sont même souvent en conflit ouvert69. En effet, quelque trente ans après la chute du mur de Berlin, l’Europe est confrontée à la persistance de trois mémoires du communisme bien distinctes, en particulier à propos de la Seconde Guerre mondiale. L’Europe centrale et orientale, et, surtout, les ex-républiques soviétiques baltes et d’Ukraine occidentale conservent une mémoire tragique du communisme, marquée par l’invasion de l’Armée rouge, la terreur de masse imposée par le NKVD/KGB et quarante-cinq ans de dictature, de censure et d’enfermement – tout comme l’Ukraine orientale traumatisée par la grande famine organisée par Staline en 1932-1933 pour écraser la résistance à la collectivisation. À l’inverse, l’Europe occidentale, qui grâce à la protection américaine a vécu dans la paix civile et la prospérité après 1945, entretient une mémoire glorieuse du communisme ; celle-ci repose pour l’essentiel sur la mémoire de ce que François Furet a nommé « le charme universel d’Octobre » – le rêve de tous les révolutionnaires de la « prise du palais d’Hiver » –, de l’antifascisme des années 1930 – Front populaire, guerre d’Espagne, etc. – et de l’engagement actif des communistes dans la résistance à l’occupant nazi ou fasciste à partir du 22 juin 1941. Durant un demi-siècle, une puissante propagande communiste a contribué à mettre en place une hypermnésie de l’antifascisme et une amnésie de l’alliance soviéto-nazie.

Quant à la Russie, elle est prise dans une mémoire schizophrénique, à la fois tragique et glorieuse. D’un côté, les traces mémorielles de la terreur, des famines, du Goulag et de la dictature touchent d’innombrables familles ; de l’autre, le pouvoir postcommuniste s’emploie à reconstruire une identité russe sur la seule mémoire de ce que Staline avait nommé la « Grande Guerre patriotique » et de la victoire de 1945 sur l’Allemagne nazie, en occultant aussi bien les crimes de masse de la guerre civile et des années 1930 que ceux qui ont accompagné, en 1939-1941 puis en 1944-1953, l’annexion/soviétisation de plusieurs nations, ouvertement présentée comme une « libération ».

Encore en 2009, le général Lev Sotskov, membre du renseignement militaire soviétique depuis 1956, s’est appuyé sur 700 pages tirées des archives du renseignement pour justifier le pacte du 23 août 1939, sous prétexte que les délégations franco-anglaises à Moscou auraient refusé l’offre faite par Vorochilov le 15 août d’une alliance militaire : c’est ce refus qui aurait poussé Staline vers l’Allemagne, or nous avons montré ici qu’il n’en était rien. Pourtant, fin août 2019, le ministère des Affaires étrangères russe a repris ce même discours distillé sur les réseaux sociaux70.

Dans la même veine, dans Le Figaro du 7 mai 2005, Vladimir Poutine a signé une pleine page intitulée « Les leçons de la victoire sur le nazisme » où il a repris toute la vulgate soviétique sur la « libération » de l’Europe centrale, oubliant que « libération » ne signifie pas « liberté ». Il est allé plus loin dans la provocation en évoquant une autre fois « les localités réduites en cendres comme Kathyn », relayant ainsi l’opération du KGB qui, dans les années 1970, avait cherché à brouiller les pistes en mettant à l’honneur, parmi des milliers de villages détruits par l’occupant allemand, le village biélorusse de Kathyn, à l’orthographe presque semblable de celui de Katyn, ce qui inévitablement laissait penser que le massacre qui y avait eu lieu était le fait des nazis71. En 2011, Jérôme Amimer, un réalisateur français originaire de Limoges, a contribué à cette manipulation en réalisant un documentaire sur le mémorial de Kathyn, mis en parallèle avec Oradour-sur-Glane.

Poutine déclare dans ce fameux article du Figaro qu’en 1989, le Soviet suprême de l’URSS a donné une appréciation juridique et morale précise du pacte Molotov-Ribbentrop. Faut-il en conclure qu’il ne parvient toujours pas à penser l’histoire en dehors de la version soviétique officielle ? D’autant que notre « professeur » ne dit pas un mot sur le second pacte germano-soviétique, du 28 septembre 1939, fixant les frontières et assurant une collaboration de la Gestapo et du NKVD.

Poutine se plaint de l’attitude des États baltes, mais n’a pas un mot sur le sort des pays occupés par l’URSS. L’URSS a-t-elle traité autrement que les nazis les pays qu’elle a annexés entre 1939 et 1941 et occupés à nouveau en 1944-1945 ? Certes, l’Armée rouge a libéré les pays d’Europe de l’Est du nazisme, mais il ne faut pas confondre libération et liberté. Ces pays ont été soumis à une autre oppression. Poutine nie également les massacres soviétiques de Katyn en Pologne, rendant hommage aux victimes de Kathyn, village biélorusse à l’orthographe proche où furent commis des massacres par les nazis. Le président Poutine a également honoré l’alliance conclue par De Gaulle et Staline à Moscou en décembre 1944, mais il oublie le mépris que le second avait pour la France.

Ce négationnisme historique montre que Poutine est resté fidèle à l’enseignement qui pouvait être dispensé sous l’ère brejnévienne à un officier du KGB.

Honneur aux USA ?

Disons le, c’est une longue tradition en URSS, puis en Russie de manipuler l’histoire et en particulier ces acte fondateur qu’est « la grande guerre patriotique », les faits, anecdotes qui la compose, mais aussi les termes comme celui de « nazi » :

Parades. Ce n’est que vingt ans après l’hécatombe, en 1965, sous Leonid Brejnev, que la tradition des parades militaires du 9 mai sur la place Rouge fut inaugurée. Alors que Staline était gêné par ses propres crimes de guerre et Khrouchtchev par le spectre de Staline, pour Brejnev et le cercle de conservateurs qui l’entourait, les commémorations de 1965 « furent un premier essai pour essayer de réhabiliter un peu Staline », estime Iouri Mochkov, historien à l’université d’Etat de Moscou. En pleine guerre froide, la célébration de cette victoire donna surtout l’occasion à l’URSS d’organiser un impressionnant déploiement de ses armes, chars, canons et missiles nucléaires… qui, comme le soulignait le reportage des Izvestia du 9 mai 1965, avaient alors un sens très actuel : « Devant les tribunes passent les terribles missiles de nos sous-marins océaniques. Ces fusées sont équipées d’ogives nucléaires qui, lancées sous l’eau, peuvent frapper des cibles éloignées de plusieurs milliers de kilomètres… »

Et la suite n’a fait qu’empirer cette continuité. Cependant en 2005, la rhétorique est très, très loin d’avoir cette tonalité actuelle si inquiétante. La dernière preuve en est que Poutine semble amorcer une timide reconnaissance des crimes staliniens dans un discours le 6 mai 2005.

b) 2014-2022

Le contexte

Les années suivantes sembleront confirmer une sorte de dégel très lent de la reconnaissance des crimes soviétiques. En 2010, Poutine se déplace en Pologne pour reconnaître les crimes de Katyn.

C’est en 2014, suite à la révolution Euromaïdan que tout semble se renverser. La rhétorique change du tout au tout.

Lors de cette révolution des partis d’extrême droite Ukrainiens participent aux manifestations. Le 1er janvier, par exemple environ 15 000 personnes défilent lors de la marche annuelle, organisée par le parti d’extrême-droite Svoboda, pour célébrer le 105e anniversaire de la naissance de Stepan Bandera, figure majeure du nationalisme ukrainien, qui à la tête de l’Organisation des nationalistes ukrainiens, combattit les différents envahisseurs entre les années 1930 et 1950.

En face les partis pro russes financés et téléguidés par le Kremlin (parti des régions de Porochenko, et le parti communiste Ukrainien– ancienne branche du PC soviétique) votent des lois anti manifestations répressives. L’église Orthodoxe ukrainienne prend parti pour le mouvement et critique l’impérialisme de l’église orthodoxe russe.

Tous ces événements mènerons à la révolution Orange, puis aux événements du Donbass et de Crimée, largement soutenus et financés en sous main par Poutine.

Les « affaires » de la Crimée et du Donbass de 2014 ne relèvent pas d’une guerre civile mais bien d’une guerre impérialiste, mélangeant influence militaire, économique et softpower actionnés par la Russie de Poutine.

Laura Jockusch, professeur d’études sur l’Holocauste à l’Université Brandeis dans le Massachusetts, que les affirmations de Poutine selon lesquelles l’armée ukrainienne aurait perpétré un génocide contre les Russes dans la région du Donbass sont totalement infondées, mais politiquement utiles pour lui.

« Poutine répète ce mythe du ‘génocide’ depuis plusieurs années et personne en Occident ne semble l’avoir écouté jusqu’à présent« , dit-elle.

« Il n’y a pas de ‘génocide’, pas même de ‘nettoyage ethnique’ perpétré par l’Ukraine contre les Russes de souche et les russophones en Ukraine. C’est une fiction qui est utilisée par Poutine pour justifier sa guerre d’agression contre l’Ukraine.« 

Elle ajoute que son utilisation du mot « dénazification » est aussi :

« un rappel que le terme « nazi » est devenu un terme générique pour »mal absolu » qui est complètement déconnecté de sa signification et de son contexte historiques d’origine« .

Et c’est précisément là que le discours du Kremlin change radicalement et commence à exploiter de façon outrancière, la grande guerre patriotique (et son utilisation outrancière actuelle), les faits historiques et « les nazis ».

En Europe et tout particulièrement en France (où les pro Poutine sont très nombreux de par l’influence du softpower russe qui appuie et finance les partis d’extrême droite), on ignore plus ou moins sciemment ce changement radical et on continue à aduler Poutine. Qui gagne d’ailleurs de nombreux adeptes en soutenant aussi certains leaders des GJs, puis ceux des antivax à la faveur de la « crise covid ».

Au passage rappelons que pendant que le Kremin téléguide les antivax en France, le pouvoir appelle à la vaccination en Russie…

Pour aller au restaurant à Moscou ou se faire soigner à l’hôpital, il faudra bientôt exhiber un QR code attestant de sa vaccination contre le Covid-19.

Les nombreux employés des secteurs bancaires, de la restauration, des transports et du service public devront également se faire injecter le vaccin sous peine de grosses amendes pour les employeurs.

Ces mesures drastiques, qui s’apparentent à une forme de vaccination obligatoire, ont été imposées par les autorités moscovites pour pousser la population à se faire vacciner.

C’est ainsi qu’on assiste à des événements de propagande téléguidés par des canaux du pouvoir russe comme RT.

Revenons sur ce changement de ton radical à Moscou suite aux événements d’Euromaïdan.
Un excellent article de Libération est publié sur ce sujet en 2014. Il note des discours absolument hallucinants des canaux de la propagande russe et pointe ce changement radical, mais aussi la duplicité du discours, le montrant comme la reprise de la propagande stalinienne de longue date :

Aujourd’hui, dans les médias russes, la rhétorique fasciste le dispute aux déclarations antifascistes pour justifier la guerre d’agression en cours en Ukraine. Sur les chaînes nationales, on rend les Juifs responsables de l’Holocauste, un intellectuel proche du Kremlin vante les qualités d’homme d’Etat de Hitler[Poutine louera également les qualités de Goebbels–NDLR], des défilés de nazis russes, le 1er mai, torche à la main, en formation de swastikas, sont présentés comme des rassemblements antifascistes, et une campagne contre les homosexuels passe pour une défense de la véritable civilisation européenne. Dans la foulée de l’invasion ukrainienne, le gouvernement russe a fait appel aux membres de groupes d’extrême droite pour soutenir son action et répandre la version de Moscou des événements. Des politiciens européens d’extrême droite sont venus en « observateurs » des élections organisées dans l’est de l’Ukraine soutenues par la Russie, comme ils étaient venus plus tôt pour le référendum truqué en Crimée occupée.

En tout cas pour Poutine le discours est dès lors tracé, les « nazis » ont organisé le mouvement d’Euromaïdan et tous les soutiens du nouveau gouvernement en Europe le sont également :

Et tout ceci va en accélération depuis. Particulièrement depuis l’invasion de l’Ukraine cette année. Vladimir Poutine, publie le 12 juillet 2021 sur le site du gouvernement russe, peu après la fin d’une phase d’escalade de la crise russo-ukrainienne 2021 un essaie dénommé : « De l’unité historique des Russes et des Ukrainiens » (en russe : Об историческом единстве русских и украинцев ).

Le texte est un essai de pure propagande niant l’histoire Ukrainienne et déniant l’existence de la nation Ukrainienne. L’obsession « nazi » y est déjà présente. Celle servant à justifier de facto l’agressivité de la Russie envers l’Ukraine.

Dans sa déclaration du 24 février 2022, préalable à l’invasion russe sur le territoire ukrainien, Vladimir Poutine déclare vouloir « démilitariser et de dénazifier l’Ukraine ».

On a dès lors l’effet d’une inversion accusatoire massive, omniprésente sur les médias russes et ceux qui les relayent en France.

Exemples :

 L’Ukraine est gangrenée par « l’idéologie néo nazi ».

–Porochenko, ancien allié de la Russie est désormais qualifié de « nazi ».

 Les USA sont comparés au ministère de la propagande « nazi ».

 Les politiques occidentales sont comparées aux autodafés nazis.

 Ce n’est parce que Volodymyr Zelensky est juif qu’il ne serait pas nazi explique Serguei Lavrov, « Hitler aussi avait du sang juif ». Un comble vu que cette théorie du complot a été montée par un ancien nazi.

 D’ailleurs Israël soutiendrait le « gouvernement néo nazi » de Kyiv.

Etc. etc.

Et cette propagande est largement reprise par les soutiens de Poutine en France !
Agit prop nazi

Mais ceci n’est que quelques exemples. En réalité ce sont des centaines de milliers de ces messages qui sont publiés… CHAQUE JOUR…

Message de propagande, mais aussi des infoxs, visibles parfois au premier coup d’œil parfois non. Les intoxs de ce style sont extrêmement nombreuses.

Comme l’ambassade de Russie en Afrique du Sud, qui publie une pochette de soit disant timbres édités par l’Ukraine glorifiant les « héros nazis ukrainiens », fake news immédiatement reprise par des comptes qui le font bien : un adepte du « parti communiste russe » pro poutine et du PRCF français (des rouges bruns grand teint).

Ah et au fait pourquoi des faux ? Non seulement parce que le prix n’est pas indiqué et que ces timbres ne sont pas répertoriés sur le site de la poste Ukrainienne. Un montage donc.

Ou celle ci confondant allègrement les personnes sur une vague ressemblance :
Une Brazonade

Rappelons que le relais de cet infox, Gérard Brazon est un habitué du genre, régulièrement épinglé pour ses mensonges par notre association et proche de « Riposte Laïque ».

On notera le gloubi boulga de la bouse qui mélange antivaxisme, « nazis ukrainiens », la fake news sur « Jean Michel Trogneux« , et y ajoute des hashtags populaires au moment de la publication pour augmenter sa viralité. Le compte du hoaxeur est lui-même un festival montrant la véritable réalité alternative dans laquelle se trouvent ces gens. Quand ils ne sont pas des trolls de ferme russes payés pour répandre ces fausses nouvelles. Preuve si il en est que la bataille de l’information, pardon de la désinformation est essentielle pour le Kremlin.

Kremlin qui va jusqu’à recruter massivement dans les pays africains francophones.

2) « #Ukronazis » et « #Russonazis » sont dans un bateau.

a) Les « #Ukronazis »

Mais sur le fond de cette affaire qu’en est il ? Ou dit autrement existe t’il des « nazis » en Ukraine ?

On sait maintenant que la propagande poutinienne est axée principalement sur le « régiment Azov », et que les relais aussi les cite tous azimuts et même des exactions commises par les russes eux mêmes.

La photo des trois nazillons est par exemple malheureusement vraie. Il s’agit de Serhii Filimonov, un des fondateurs du groupe Hooligan « Honor », engagé dans Azov, mais pour notre explication, il est intéressant de noter cette « haine des russes » relatée dans l’article. Et on ne peut pas dire que les néo nazis soient absents du pays. Sauf que par exemple si le « bataillon Azov a été fondé à la base sur un de ces groupes, il a ensuite intégré près de 5000 combattants. Et ce n’est pas cette idéologie qui les a attiré mais les succès glorieux de ce bataillon contre les forces séparatistes comme relaté dans cet article.

Conclusion intéressante :

« Il y a, en effet, des groupes néonazis qui ont pignon sur rue dans le pays. On croise des personnes avec une Svastika sur le t-shirt », reconnaît Eric Aunoble. Mais, les urnes ukrainiennes n’ont jamais donné la part belle à l’extrême droite. Volodymyr Zelensky, élu sur un programme anticorruption, de rupture avec les élites politiques et ouvert sur l’Europe, a obtenu 73 % des suffrages en 2019. En comparaison, le parti d’extrême droite Svoboda a récolté 1,62 % des voix. En 2014, alors que la Crimée vient d’être annexée par la Russie et que la guerre éclate dans le Donbass, Svoboda et Secteur Droit obtiennent moins de 2 % des voix à eux deux. « À chaque fois qu’ils se présentent, ils se prennent une tôle monstrueuse », commente Eric Aunoble.

Malgré ces échecs, la question du nationalisme est très présente en Ukraine. En 2016, l’avenue de Moscou, à Kiev est baptisée au nom de Stepan Bandera, un nationaliste ukrainien connu pour sa collaboration. « L’Ukraine est un pays jeune qui n’a jamais eu l’occasion de bâtir une mémoire et une culture », modère Adrien Nonjon. « Le choix de certains symboles, comme Bandera, relève du besoin pour une nouvelle nation d’avoir des figures de référence dans une période de trouble, au moment ou la société est mise à l’épreuve. » Pour le chercheur, au vu de la situation, « l’Ukraine est focalisée sur la guerre. Les questions d’extrême droite et le devoir de mémoire, passent de fait au second plan ».

Paradoxalement c’est la guerre que mène Poutine depuis 2014 contre l’Ukraine qui attise ces références, sans que ce soit une idéologie nationale (bien au contraire au vu des résultats électoraux de ceux ci).

Mais d’où viennent ces références ?

Il faut commencer, nous semble t’il avec « l’Holodomor ». « Holodomor » signifie en ukrainien : Голодомо́р, littéralement « famine », de la racine го́лод, « faim », et мор, « fléau », formé comme calque du tchèque hladomor (« famine ») en 1933, mais qu’on peut traduire par « extermination par la faim ».

Cette grande famine est probablement la catastrophe à très grande échelle la plus escamotée de l’histoire du siècle européen : entre quatre et cinq millions de morts, il y a 90 ans, en Ukraine . Plusieurs millions d’Ukrainiens et d’Ukrainiennes, morts de faim, alors que la paysannerie s’était soulevée contre la société tsariste en décomposition puis la Russie soviétique qui entendait installer sa réforme des kolkhozes. La répression soviétique avait consisté à confisquer récoltes et semis, pour finalement préempter du bétail et confiner de force la population sur des terres privées de tout. En anglais, on parle d’une « man-made famine« , pour bien dire que la catastrophe, forgée par une main humaine, n’avait rien d’inéluctable. Ailleurs en Union soviétique, au Kazakhstan notamment, la famine aussi avait tué à cette échelle massive : 1,5 millions de morts kazakhs, estime-t-on aujourd’hui, et autant en Russie soviétique. Entre six et sept millions de morts au total.

C’est dans la collectivisation forcée des campagnes, via les kolkozes, que ces famines prennent racine. Mais cet épisode n’est pas lié aux aléas des saisons : il est bien politique. On considère aujourd’hui que Staline a usé de la faim comme d’une arme. Il s’agissait de mater l’opposition en Ukraine, où les paysans ont résisté plus longtemps à la planification qu’ailleurs. L’armée rouge, alors, n’occupait pas militairement toute la région d’Ukraine. Mais à travers cette politique de collectivisation, des plans étaient imposés aux paysans, et ceux qui échouaient, ou renâclaient, était intentionnellement affamés, et leur blé, confisqué.

Les famines qui décimeront alors la région entre 1931 et 1933 sont ainsi directement liées au sentiment national ukrainien. Non seulement parce que leur mémoire, toujours vivace, porte en elle l’idée d’une résistance coûteuse à Moscou. Mais aussi parce qu’à l’époque même, il fut question de faire obstacle au stalinisme en train d’irradier d’ouest en est à l’échelle du nouvel empire soviétique.

En Ukraine, on dit “Holodomor” pour nommer ce que les Ukrainiens revendiquent de faire reconnaître comme un génocide. Bientôt un siècle après l’épisode, la notion de génocide fait toujours débat, chez les historiens ou aux Nations-Unies (qui n’ont jamais retenu cette qualification juridique, bien que le Congrès américain, comme le Canada et d’autres pays, aient reconnu le génocide).

A son arrivée au pouvoir, en 2004, dans la foulée de la “Révolution orange”, le président ukrainien Viktor Iouchtchenko s’était engagé dans une vaste entreprise pour obtenir la reconnaissance de la Grande famine comme un des génocides de l’histoire européenne du XXe siècle : une loi a été adoptée au Parlement ukrainien en ce sens fin 2006. Cinq ans après l’éclatement de l’URSS, elle instaure l’usage du mot “génocide”. Dans la foulée, les autorités ukrainiennes lançaient une vaste politique mémorielle autour de la Grande famine de 1933, avec une commémoration chaque année, à la fin du mois de novembre. Non seulement du point de vue de l’Etat, qui met les drapeaux en berne et dont les représentants assistent à une messe, mais aussi à hauteur d’habitant : il est d’usage, ce week-end-là, de placer aux fenêtres des bougies à la mémoire des victimes de l’Holodomor.

Et bien entendu il est au mieux ignoré ; au pire nié par le pouvoir russe. Soljenityne lui-même dira en 2008 :

“le cri provocateur en faveur du soi-disant génocide, né d’abord discrètement dans les esprits renfermés chauvinistes anti-russes, et qui a maintenant gagné les cercles dirigeants de l’Ukraine”.

Un véritable négationnisme du pouvoir russe, mais aussi des partis communistes du monde, dont le PCF. Herriot, pourtant radical, déclarera à son retour d’Ukraine soviétique en août 1933 :

« J’ai traversé l’Ukraine. Eh bien ! je vous affirme que je l’ai vue tel un jardin en plein rendement. On assure, dites-vous, que cette contrée vit à cette heure une époque attristée ? Je ne peux parler de ce que je n’ai pas vu. Pourtant je me suis fait conduire dans des endroits qu’on disait éprouvés. Or, je n’ai constaté que la prospérité. »

Cette prise de conscience est aussi toujours vivace, à l’heure où l’Ukraine subit à présent l’agression de la Russie de Vladimir Poutine. La chercheuse Anna Colin Lebedev, dont il faut suivre les éclairages précieux sur Twitter depuis le début du conflit, a fait le rapprochement entre la famine des années 1930 et l’agression russe aujourd’hui.

https://twitter.com/colinlebedev/status/1520808730975162370

Les Ukrainiens aussi, qui entretiennent le souvenir toujours vif de l’Holodomor, cet épisode de famines qu’il considèrent comme un génocide. Au vu du présent dramatique, c’est ainsi une histoire méconnue qui remonte à la surface, avec Moscou en dénominateur commun.

Cette mémoire est sans aucun doute associée à ce qui se passe actuellement autour du blé entre l’Ukraine et la Russie, mais aussi sur cette fable russe de « nazification ».

Malgré une indépendance retrouvée en 1991, l’émergence d’un nouveau sentiment national en Ukraine a été longue, parfois ambiguë et souvent difficile. Dans sa volonté d’apparaître comme une force motrice dans le processus de réconciliation nationale, l’État ukrainien a dû trouver un chemin entre des mémoires divergentes pour espérer atteindre son but initial : incarner une souveraineté retrouvée, et affirmée. Cette nécessité est d’autant plus justifiée qu’elle est au centre d’une bataille mémorielle qui l’oppose à la Russie. En effet, depuis la Révolution Orange de 2004, la mémoire et la construction nationale ukrainienne sont associées de façon péremptoire et réductrice dans la propagande russe à l’extrême droite quand ce n’est pas au « fascisme ». Cette stratégie de discrédit qui s’est intensifiée avec la guerre n’a d’autre finalité que de réduire l’histoire ukrainienne à la simple expérience de la collaboration et aux horreurs de la Solution finale en Europe orientale pendant la Seconde Guerre mondiale. Plus que jamais aujourd’hui, cette mémoire apparaît en filigrane des ambitions politico-stratégiques russes qu’on retrouve à travers le discours de dénazification ».

L’Holodomor a activement contribué à l’élaboration d’une pensée nationaliste Ukrainienne. Et malheureusement à de terribles errements dont la collaboration avec l’Allemagne nazie. La terreur stalinienne (et donc l’Holodomor) ont poussé certains ukrainiens dans les bras du reich.

C’est en Galicie que se développent à partir du XIXème siècle siècle les premiers sentiments et théories nationalistes chez les ukrainiens occidentaux, défendant le droit de l’Ukraine à exister comme une nation souveraine et indépendante. La Galicie faisait partie jusqu’en 1918 de l’Empire Austro-Hongrois. À cette époque, la seule université enseignant l’ukrainien et publiant des ouvrages dans cette langue était située à Lemberg (Lviv en ukrainien ou Lwow en polonais). Dominée de 1772 à 1918 par l’empire Austro-Hongrois puis de 1918 à 1939 par la Pologne mais gardant le droit d’user de la langue ukrainienne contrairement aux ukrainiens orientaux.

Intégrée dès la création de l’URSS en 1922, plusieurs mouvements nationalistes se créent dans la clandestinité, tels que l’OUN et l’UPA. Voyant l’arrivée de l’Allemagne hitlérienne comme une opportunité d’indépendance, ils sont accueillis par l’OUN et l’UPA en formant une collaboration de circonstance. Culturellement, de nombreux Ukrainiens de Galicie avaient étudié l’allemand à l’école et ont servi dans l’armée austro-hongroise. L’arrivée des Allemands est accueillie, par eux, comme un retour à l’ancien régime, plus favorable aux aspirations nationales ukrainiennes, par opposition à l’attitude des « grand-russes » refusant de reconnaître les spécificités de l’Ukraine.

C’est parmi ces groupes nationalistes controversés qu’opérera le non moins controversé nationaliste Stepan Bandera, si souvent cité par les russes comme leur « nazi bête noire ».
A ces lectures, il semble bien difficile de ranger autoritairement Bandera, ou ces mouvements directement dans la même fosse à lisier que les nazis. Expliquons nous. L’Ukraine sort à l’époque d’une crise majeure qui lui a fait perdre entre 4 et 8 millions de sa population (soit environ 15% de la population totale), elle ploie sous la dictature stalinienne qui lui nie son statut, son existence (et certains dirons son statut d’être humain). En même temps à l’époque les crimes du reich hitlérien sont mal connus en Ukraine, mais sa haine du « communisme » le sont.

Ne serait il pas, SANS AUCUNEMENT EXCUSER, MAIS BIEN EXPLIQUER, possible de mieux comprendre ce mouvement nationaliste ukrainien ? D’autant qu’une fois que les forces nazies ont commencé à exterminer les Ukrainiens, ceux ci se sont alors retournés contre les nazis ?

Stepan Bandera réalise sa naïveté en 1941, et constate que l’Allemagne s’intéressait à l’OUN uniquement dans le but d’affaiblir la Pologne et l’URSS. Le 5 juillet 1941, Stepan Bandera est arrêté à Cracovie et transféré à Berlin avec Iaroslav Stetsko. Il sera gardé, assigné à résidence par les nazis qui essaierons de le convaincre de reprendre la lutte contre Moscou, ce qu’il refusera.

Il semble donc bien difficile de comprendre cette période sans la remettre dans son contexte.

Or aujourd’hui l’histoire d’hier semble se répercuter aujourd’hui.

La Russie Poutinienne réhabilite Staline, et le régime actuel devient de plus en plus autoritaire.

Même régime qui nie toute aspiration au droit fondamental des Ukrainiens à disposer d’eux mêmes.

Pire qui lui nie toute existence réelle.

Où les médias rapportent qu’on vend, en Ukraine occupée comme en Crimée notamment, des produits agricoles confisqués par l’armée russe dans la région de Kherson ;

Où le ministère ukrainien de l’Agriculture évoque du matériel agricole et des stocks parmi les prises de guerre des soldats russes ;

Où l’ONU alertait très récemment face à un risque de famine mondiale du fait de l’agression russe, dès lors que la Russie et l’Ukraine comptent pour deux des cinq premiers exportateurs de céréales au monde.

Où l’URSS accusait les Ukrainiens d’être complices des « impérialistes occidentaux », la Russie Poutinienne les accuse d’être « nazis ».

C’est dans la collectivisation forcée des campagnes, via les kolkhozes, que ces famines prennent racine. Mais cet épisode n’est pas lié aux aléas des saisons : il est bien politique. On considère aujourd’hui que Staline a usé de la faim comme d’une arme. Il s’agissait de mater l’opposition en Ukraine, où les paysans ont résisté plus longtemps à la planification qu’ailleurs. L’armée rouge, alors, n’occupait pas militairement toute la région d’Ukraine. Mais à travers cette politique de collectivisation, des plans étaient imposés aux paysans, et ceux qui échouaient, ou renâclaient, était intentionnellement affamés, et leur blé, confisqué. Les famines qui décimeront alors la région entre 1931 et 1933 sont ainsi directement liées au sentiment national ukrainien. Non seulement parce que leur mémoire, toujours vivace, porte en elle l’idée d’une résistance coûteuse à Moscou. Mais aussi parce qu’à l’époque même, il fut question de faire obstacle au stalinisme en train d’irradier d’ouest en est à l’échelle du nouvel empire soviétique.

On le voit donc le nationalisme ukrainien est singulièrement lié à l’impérialisme russe, et la situation actuelle comporte de nombreux points de convergence avec les années 30.

La réponse à la question posée de ce chapitre s’éclaircit donc. Oui le nationalisme ukrainien produit des éléments que l’on peut qualifier de « nazifiant », mais aujourd’hui ils se sont vite dissous dans la population (ou dans le régiment Azov quand le groupe « primitif » a intégré l’armée officielle) et son idéologie n’est pas partagée par l’immense majorité du pays qui aspire à des valeurs démocratiques.

Mais on le voit :

Le rapprochement fait par Vladimir Poutine entre le pouvoir en Ukraine et l’idéologie néonazie n’est pas nouvelle, selon les experts interrogés par l’AFP.

« C’est entre 2005 et 2007 que les Russes vont commencer à bâtir progressivement leur narratif disant que l’Ukraine soutient le néonazisme« , indique Adrien Nojon.

Après la « Révolution Orange » de 2004, soulèvement contre la tutelle russe pour contester l’élection frauduleuse du nouveau président prorusse Viktor Ianoukovitch, le pro-occidental Viktor Iouchtchenko arrive au pouvoir. Or, « Viktor Iouchtchenko va mettre en place un certain nombre de voix mémorielles pour donner à la nation ukrainienne des symboles de référence. Deux vont choquer aussi bien les Russes que les Russophones du Donbass : il octroie le titre de héros de l’Ukraine à des personnalités ayant appartenu à l’organisation des nationalistes ukrainiens et à l’armée insurrectionnelle ukrainienne (UPA) : Roman Choukhevytch et Stepan Bandera« , explique Adrien Nonjon. Pendant la Seconde Guerre mondiale, l’UPA, branche armée des nationalistes ukrainiens a collaboré avec l’Allemagne nazie , sous la houlette de Roman Choukhevytch et Stepan Bandera, avant de s’y opposer. Elle a ensuite combattu l’URSS dans l’ouest de l’Ukraine, alors république soviétique, jusque dans les années 50. Stepan Bandera reste un personnage controversé en Ukraine : si certains le considèrent comme un héros national et symbole de la lutte pour l’indépendance, d’autres l’accusent d’avoir collaboré avec les nazis.

« Ce narratif du Kremlin s’est accéléré au moment du Maïdan, en 2014, lorsqu’une partie de l’extrême droite est intervenue et a défendu les manifestants contre la répression exercée par le président Viktor Ianoukovitch, élu en 2010. Parce que les nationalistes n’aiment pas les orientations pro-russes du président, mais aussi parce qu’ils avaient une expérience de la violence de par leur tradition paramilitaire« , rapporte Adrien Nonjon. Des dizaines de milliers de manifestants réclament la destitution du président qu’ils obtiennent après un bain de sang sur la place Maïdan entre le 18 et le 20 février 2014, suivi par la fuite en Russie de Viktor Ianoukovitch. Un gouvernement de transition est alors mis en place autour du président par intérim Oleksandr Tourtchynov. « Vladimir Poutine a qualifié ce changement de pouvoir de ‘coup d’État organisé par des fascistes et des nazis ‘, des termes qu’il a repris par la suite sans discontinuer« , poursuit Anne de Tinguy. Une rhétorique alimentée par le fait que figurent, « dans ce gouvernement de transition, cinq ministres affiliés à l’extrême droite nationaliste ukrainienne, mais qui ont très rapidement été remplacés« , note Adrien Nonjon.

Sauf que, sauf que Poutine est bien mal placé pour aller dénoncer les « nazis » en Ukraine quand on observe objectivement la situation en Russie… Comment ca ? Et bien, Poutine n’est carrément pas un saint en ce qui concerne les extrêmes droites, en Russie même ou ailleurs.

b)Les « #Russonazis »

Lorsque le président russe Vladimir Poutine a affirmé que l’invasion militaire de l’Ukraine par la Russie avait été lancée pour poursuivre la « dénazification » de l’Ukraine, cela a évoqué un niveau de « gaslighting » (ou « détournement cognitif ») – tenter de faire en sorte que les autres remettent en question leur propre réalité – qui en est venu à définir l’approche géopolitique du Kremlin. Tout comme la Russie a bombardé des hôpitaux à Alep et imputé avec désinvolture les atrocités aux « terroristes », Moscou cherche maintenant à attiser les flammes de l’extrémisme et de la violence d’extrême droite transnationale pour soutenir les atrocités qu’elle commet à Marioupol et ailleurs dans toute l’Ukraine. Plutôt que de se battre contre les néonazis, Poutine soutient les extrémistes d’extrême droite, y compris les suprématistes blancs, depuis des années. La Russie a nourri des néo-nazis et utilisé des mercenaires et d’autres extrémistes pour mener une guerre séparatiste en Ukraine.

Les groupes paramilitaires.

Le groupe Wagner

Le « mandataire militaire » le plus notoire de Moscou est peut-être le groupe Wagner , des mercenaires que le Kremlin a utilisés pour mener une guerre niable et promouvoir ses intérêts dans des endroits comme la Syrie, la Libye et le Mozambique. Récemment, le groupe Wagner s’est déployé en République centrafricaine , et il s’est manifesté au Mali, où ses méthodes brutales semblent remplacer les efforts antérieurs de la communauté internationale pour lutter contre les terroristes actifs dans le pays.

Ce groupe est dirigé par #DimitriOutkine lieutenant-colonel au sein des Spetsnaz 2013 et ancien membre du Corps slave. Il appartient à Yevgeny Prigozhin , un oligarque étroitement lié à Poutine.

Le fondateur de la société serait Dmitriy Valeryevich Utkin, vétéran de la première et de la deuxième guerre tchétchène. Jusqu’en 2008, Utkin était lieutenant-colonel et commandant de brigade des forces spéciales de la direction principale de l’état-major général de l’unité des forces armées russes (le 700e détachement indépendant de Spetsnaz de la 2e brigade indépendante) du principal renseignement russe (GRU).

Utkin était en Syrie dans le cadre du Corps slave Le nom de la société vient du propre indicatif d’appel d’Utkin ( » Wagner « ), qu’il aurait choisi en raison de sa passion pour le Troisième Reich. Beaucoup des membres de Wagner seraient des adeptes de la « foi autochtone slave« .

En décembre 2016, Outkine (ou « Utkin » donc) a été photographié avec le président russe Vladimir Poutine lors d’une réception du Kremlin donnée en l’honneur de ceux qui avaient reçu l’ Ordre du courage et le titre de héros de la Fédération de Russie(pour marquer la Journée des héros de la patrie ), avec Alexander Kuznetsov , Andrey Bogatov et Andrey Troshev. Kuznetsov (indicatif d’appel » Ratibor ») aurait été le commandant de la première compagnie de reconnaissance et d’assaut de Wagner,Bogatov était le commandant de la quatrième compagnie de reconnaissance et d’assaut, et Troshev était le « directeur exécutif » de la compagnie.

Pour le New-York Times : « ses relations avec le Kremlin sont obscures et non confirmées,mais ses dirigeants auraient été décorés au Kremlin et ses mercenaires sont formés dans les installations du ministère russe de la Défense ».

Le financement du Groupe Wagner est lié, au moins en partie, au ministère de la Défense russe. Le ministère signe des contrats avec des entreprises proches de Prigojine et une partie de l’argent de ces contrats est effectivement dirigé vers le financement du Groupe. Le budget annuel du Groupe Wagner est estimé à 30 millions de dollars américains. Une photo diffusée en 2020, montre notamment Outkine arborant des tatouages nazis. En 2020, une tablette abandonnée par un combattant russe à Ain Zara, pendant la bataille de #Tripoli, en #Libye, est découverte et analysée par des journalistes de la #BBC et de #Newlines.

L’Orient-Le Jour indique que :

« C’est surtout la composante idéologique qui pourrait durablement modifier l’image de ces combattants de l’ombre. Depuis plusieurs années, les rumeurs circulent quant aux penchants idéologiques du groupe. […] Les nouvelles informations permettent de confirmer et d’élargir ces données. Outre les ouvrages de littérature militaire, le manifeste d’Adolf Hitler, Mein Kampf a été retrouvé dans la bibliothèque électronique de la tablette oubliée à Ain Zara. L’identification du profil en ligne de quelques soldats confirme ce faisceau d’indices préexistants : références à la Seconde Guerre mondiale, tatouages et slogans nazis, symboles issus du néopaganisme associés à l’extrême droite en Russie, identification à la culture viking et pureté de la « race » slave ».

Les mercenaires de Wagner auraient laissé derrière eux de la propagande néonazie dans les zones de guerre où ils ont combattu, y compris des graffitis avec des symboles de haine.

Mais Wagner n’est pas le seul groupe de ce style…

Le « Mouvement impérial russe », ou RID (« Russkoe Imperskoe Dvizenie »)

Le RID fait partie d’un groupe plus large de groupes « orthodoxes politiques » d’extrême droite en Russie qui promeuvent la restauration de la monarchie (en particulier, en idolâtrant le passé tsariste de la Russie) et s’inspirent des Cent-Noirs violents et antisémites de la Russie du début du 20e siècle. D’autres au sein du mouvement incluent les groupes « Pour la foi et la patrie » et la résurgence moderne de « l’Union du peuple russe ». Les sites Web liés au RID professent l’antisémitisme.

En 2008, le RID a formé sa branche paramilitaire, appelée la Légion impériale. Le groupe maintient deux centres d’entraînement à Saint-Pétersbourg, dont l’un est connu sous le nom de camp Partizan, situé au sud de l’île de Heinäsenmaa. Le Partizan organise un entraînement à la guerre urbaine, un entraînement au tir, une médecine tactique, un entraînement à haute altitude, une psychologie militaire et un entraînement à la survie. Après que la guerre du Donbass a éclaté dans l’est de l’Ukraine en avril 2014, le RID a commencé à former et à envoyer des soldats volontaires aux groupes pro-russes dans le conflit en juillet.

Avec l’approbation tacite du Kremlin, le groupe gère des camps paramilitaires près de Saint-Pétersbourg dans lesquels des néonazis et des suprémacistes blancs de toute l’Europe sont formés aux tactiques terroristes.

RID ou Russkoe imperskoe dvizenie

En 2016, des terroristes formés par RID ont mené une série d’attentats à la bombe contre un refuge pour réfugiés et d’autres cibles faciles en Suède, selon le département d’État américain . Comme le groupe Wagner, RID a déployé des combattants pour aider la longue guerre du Kremlin dans l’est de l’Ukraine . Le groupe a fourni la main-d’œuvre indispensable, y compris des personnes formées aux tactiques asymétriques et aux opérations de sabotage. Le groupe, et Milchakov lui-même, ont été liés de manière crédible aux atrocités en Ukraine et en Syrie.

Le groupe « Rusich »

Le troisième groupe néo-nazi qui combat en Ukraine aux côtés de l’armée russe est Rusich et son commandant Alexei Milchakov.
Alexei Milchakov

Les dirigeants de l’organisation – Milchakov et Yan Petrovsky – ont reçu des certificats de membres de « l’Union des volontaires du Donbass » en 2015. Milchakov est également associé au groupe Wagner. Il y a quelques années, il tuait un chiot et postait une photo sur les réseaux sociaux. Milchakov a également publié à plusieurs reprises des images avec une croix gammée.

Les membres de « Rusich » s’appellent eux-mêmes une « unité de volontaires », qui de juin 2014 à juillet 2015 a participé activement au conflit armé en Ukraine aux côtés des séparatistes. En septembre 2014, près du village de Shchastya dans la région de Lougansk, des militants de Rusich ont vaincu une colonne du bataillon Aidar. Milchakov, qui y a participé, a ouvertement raconté comment il avait été photographié avec les corps des soldats ukrainiens morts.

" Je suis un nazi. Je ne vais pas aller en profondeur, un nationaliste, là, un patriote, une direction impériale, etc. Je peux lever la main. Quand vous tuez une personne, vous ressentez l’excitation de une chasse. Si vous n’avez pas chassé, essayez-le. Intéressant. À Aidar. Ceux qui me condamnent peuvent aller chercher trois lettres bien connues. C’est mon trophée. Je suis comme un chasseur. Oui. J’ai pris une photo . Le mien ".

Néo nazis russes, européens et du monde

Ces groupes de mercenaires aux idéologies néo nazies servent de phare pour les extrémistes européens. Et ce même en France.

Les mouvements néo nazis prospèrent en Russie, d’autant que le racisme y est omniprésent. Néo nazis qui participent aux mouvement officiels sans difficulté.

La Russie sert également de refuge aux extrémistes, l’un des néonazis les plus dangereux d’Amérique trouvant refuge dans le pays. La BBC a rapporté en 2020 que Rinaldo Nazzaro , le chef américain du groupe paramilitaire suprémaciste blanc The Base, vivait en Russie et dirigeait le groupe depuis Saint-Pétersbourg.

Pendant que les antifascistes y sont pourchassés.

L’Internationale des extrêmes droite organisée par le Kremlin

Et ce n’est pas tout.

Une myriade d’idéologues et d’agents néonazis américains se sont rendus en Russie, comme le rapportait le New York Times en 2016, pour assister à des conférences de réseautage , illustrant les liens internationaux troublants entre ce mouvement. Idem avec les mouvements d’extrême droite européens. Et en particulier français. C’est tout le pays qui est la proie depuis des décennies de mise en place de réseaux d’influence en particulier sur la fachosphère.

La Russie semble accueillir ces personnalités à bras ouverts. Alors que le Kremlin a brutalement réprimé des groupes de la société civile comme ceux associés au militant pro-démocratie Alexei Navalny, il a fermé les yeux sur ces suprématistes blancs.

L’Internationale fasciste existe, on peut sans conteste affirmer qu’elle est orchestrée par Poutine. Collectivement, Poutine a toléré et permis un réseau transnational de suprémacisme blanc qui s’étend dans le monde entier. C’est un instrument de plus dans la boîte à outils que Moscou utilise pour diviser les démocraties et saper les institutions démocratiques. Les suprémacistes blancs soutenus par la Russie échangent des idées et des ressources, à la fois en ligne et hors ligne, pour autonomiser des partenaires partageant les mêmes idées dans le monde entier.

A la lecture de tout ceci, on le voit et on le comprend la propagande russe Poutinienne sur les nazis n’a aucun sens. En dehors de la Russie

3) »Gaslighting » et « willing suspension of disbelief »

Il semble désormais bien clair que tout ceci n’a pas le sens en Russie que nous lui donnons en occident. Il faut sans doute aller chercher dans l’oeuvre immortelle de G. Orwell : « 1984 » de quoi poser des prémices de réelle compréhension.

Et de façon assez incroyable, les dires de Maria Zakharova, porte-parole du ministère russe des Affaires étrangères, lors d’une conférence publique à Ekaterinbourg samedi 21 mai viennent complètement corroborer cette hypothèse. En effet, à cette occasion, un membre du public avait demandé à Zakharova comment répondre à des amis et à des parents à l’étranger lorsqu’ils suggéraient que la Russie vivait dans une rediffusion moderne du roman d’Orwell.

« Orwell n’a pas écrit sur l’URSS, il ne s’agissait pas de nous« , a-t-elle répondu. « Il a écrit sur la société dans laquelle il vivait, sur l’effondrement des idées du libéralisme. Et on vous a fait croire qu’Orwell l’a écrit sur vous ». Zakharova a suggéré au spectateur de dire à ses proches à l’étranger :

« C’est vous à l’ouest qui vivez dans un monde imaginaire où une personne peut être annulée.« 

Elle a alors ajouté :

« Pendant de nombreuses années, nous avons cru qu’Orwell décrivait les horreurs du totalitarisme. C’est l’un des plus gros fakes mondiaux… Orwell a écrit sur la fin du libéralisme. Il a décrit comment le libéralisme conduirait l’humanité à une impasse »

On se pince pour croire à cette incroyable inversion accusatoire (rhétorique pourtant habituelle et préférée des extrêmes droite).

« 1984 » présente une société ultimement totalitaire dirigée par un parti unique l’ANGSOC (contraction de ANGlais SOCialisme) par l’intermédiaire d’une propagande redoutablement efficace. Le but ultime étant de contrôler littéralement les esprits, principalement par quatre moyens :

Le totalitarisme trouve son essence dans la « désolation ».

Orwell utilise quelques années avant Hannah Harendt dans 1984 un concept d’Hannah Arendt qualifiera de « désolation ». Elle définit ce concept comme la situation collective caractérisée par la conjonction de la terreur, de l’idéologie et des masses. La terreur correspond tout d’abord la suppression de la liberté extérieure, à l’absence de sujet de droit libre apte à déterminer les buts de son action. Ensuite, l’idéologie totalitaire supprime la liberté intérieure : avec ses prétentions omniexplicative et ésotérique, elle s’affranchit de la confrontation des idées et de l’expérience que requiert la recherche de la vérité. Indispensable au parti pour gagner les masses, elle se caractérise à la fois par la priorité donnée à la cohérence de son message (en dépit des faits) et par la justification de l’action présente par un prétendu sens de l’Histoire : « la scientificité de la propagande totalitaire se caractérise, décrit Hannah Arendt, par l’accent qu’elle met presque exclusivement sur la prophétie scientifique, par opposition à la référence plus traditionnelle au passé » (Le système totalitaire). En pratique, l’idéologie totalitaire condamne des catégories d’hommes, lesquels sont les « ennemis objectifs » du régime. Pour Hannah Arendt, cette double fermeture des espaces extérieur et intérieur a une incidence métaphysique : elle déshumanise l’homme. En le privant de la liberté appartenant à son essence, le totalitarisme instaure la mort de l’humain au sein de la vie elle-même.

La propagande comporte un culte de la personnalité.

Le culte dépeint par Orwell glorifie Big Brother, le chef du Parti unique et de l’État Océania. Si le gouvernant n’apparaît jamais en personne, il est connu comme un homme moustachu d’une quarantaine d’années, au regard fixe et à l’expression tout à la fois rassurante et sévère. Les principaux canaux du culte sont les nombreuses affiches de propagande, qui gravent la formule « Big Brother is watching you » (« Big Brother vous regarde ») dans l’esprit de la population, et les télécrans, présents dans les domiciles privés comme sur les lieux de travail. Les membres du Parti sont également les relais du culte, qui sont tenus d’aimer et de vénérer leur « grand frère », auteurs d’exploits révolutionnaires et créateur du Parti. « Big Brother est infaillible et tout-puissant, écrit Orwell. Tout succès, toute réalisation, toute victoire, toute découverte scientifique, toute connaissance, toute sagesse, tout bonheur, toute vertu, sont considérés comme émanant directement de sa direction et de son inspiration » (1984). Le culte de Big Brother se nourrit aussi de la diabolisation de son ennemi principal, objet des « deux minutes de la haine ». Orwell suggère au lecteur que Big Brother n’est plus un individu vivant ; qu’il ne serait plus qu’une figure de propagande, l’éternelle incarnation du Parti.

La propagande repose sur la manipulation de la langue.

Dans son roman, Orwell conçoit explicitement celle-ci comme un enjeu de pouvoir. Ainsi, une nouvelle langue, le/la « novlangue » est créée à Océania pour remplacer l’ancienne (traduite « ancilangue » en français). Encore relativement récente – son dictionnaire n’en est qu’à la onzième édition – elle n’est maîtrisée que par les spécialistes ; c’est pourquoi sa diffusion au sein de la population (prévue pour 2050) est une problématique majeure du Parti. La finalité de la novlangue est de simplifier le lexique et la syntaxe au point de rendre impossible l’expression d’idées subversives – l’intention même de critiquer le pouvoir ne pourrait plus naître dans l’esprit du citoyen.

L’altération du passé ou révisionnisme

Ce procédé d’altération continuelle n’est pas appliqué seulement au journaux, mais aussi aux livres, périodiques, pamphlets, posters, prospectus, films, chansons, dessins animés, photographies, à toute sorte de littérature ou documentation qui pourrait contenir quelque signification idéologique ou politique. Ainsi, toutes les prédictions faites par le Parti peuvent être démontrés comme étant exactes avec l’appui de ces documents. La parti la plus importante du département des enregistrements, est faite simplement de personnes dont le travail est de réunir toutes les copies de livres, journaux, ou tout autre document qui doit être mis à jour. Ce « réajustement » du passé s’explique par le besoin de préserver l’infaillibilité du parti. Tous les discours, les statistiques, les enregistrements de toutes sortes doivent être constamment mis à jour pour montrer que les prédictions du Parti sont exactes dans tous les cas. Sans référence au passé pour comparer, tout le monde se contente du présent système. Changer les enregistrements contribue à maintenir l’infaillibilité du Parti et de Big Brother, en enlevant tout ce sur quoi le Parti pouvait avoir tord. En contrôlant le passé, le Parti contrôle l’esprit de ses membres. Comme le Part possède la Vérité Absolue, les mémoires doivent être entraînées à oublier l’ancien et accepter le nouveau au moyen de la double-pensée. Le Parti est construit sur l’irréalité, ou sur de la folie contrôlée. Les gens fous ne posent pas de dangereuses questions. Ceci explique alors le slogan du Parti :

« Celui qui a le contrôle du passé a le contrôle du futur. Celui qui a le contrôle du présent a le contrôle du passé.« 

On retrouve parfaitement dans ces concepts ce que fait la Russie Poutinienne d’aujourd’hui. Et quant au vocable de « nazi », il correspond parfaitement à celui « d’ennemi objectif » du régime que combat le chef suprême (Poutine lui même) en déformant, manipulant les mots et leur sens comme on a pu le voir dans cet article. On a connu la « post vérité » et les « faits alternatifs » de Trump, on assiste aujourd’hui, un peu impuissant au storytelling déroulé par la Russie de Poutine. Et pourtant, il n’a pas commencé aujourd’hui. Et il fait florès chez ses admirateurs en France :

https://www.youtube.com/shorts/oN6TQvp_aWE

Cette guerre de l’information russe a une dimension à la fois interne et externe : elle vise, d’un côté, à laver le cerveau de ses citoyens en leur faisant perdre tout repère tout en instillant la crainte et, de l’autre, à gagner à ses thèses une partie des dirigeants et de l’opinion publique à l’étranger.

Il importe de répondre point par point et de bien viser Poutine et non « la Russie ». Et il convient avant tout de connaitre les principales techniques rhétoriques des pro poutine pour être plus efficace dans les réponses :

 « L’inversion accusatoire »

 La victimisation

 Le « whataboutisme »

 Le « mille feuille argumentatif »

 Les « Vrake news »

Et la Russie de Poutine, ainsi que la fachosphère/complosphère est ainsi arrivée à ce que Arendt décrivait en 1978 :

Quand tout le monde vous ment en permanence, le résultat n’est pas que vous croyez ces mensonges, mais que plus personne ne croit plus rien. Un peuple qui ne peut plus rien croire ne peut se faire une opinion. Il est privé non seulement de sa capacité d’agir mais aussi de sa capacité de penser et de juger. Et avec un tel peuple vous pouvez faire ce qu’il vous plaît.

Ces techniques rhétoriques décrites juste au dessus ont exactement cet effet par un résultat de « détournement cognitif » (ou « gaslighting ») et de « suspension consentie de l’incrédulité ». La victime de cette propagande hautement toxique établie sur des décennies d’action doute de son propre jugement et la suppression progressive de contre-récits. En cette matière, on en atteint aujourd’hui la pointe puisque le fait d’évoquer seulement le mot « guerre » peut être punie en Russie de 15 ans de prison. Le texte de loi russe est explicite et puni les :

« informations mensongères sur l’armée russe, surtout si elles entraînent des conséquences sérieuses pour les forces armées ».

La boucle est bouclée, comme dans 1984, vous ne pouvez contredire, ou même mettre en doute la version officielle d’état. Pire, si vous le faites, vous devenez « ennemis d’état ». La liberté individuelle est niée, l’état a la primauté, vous êtes subordonné entièrement à sa volonté. Le paradoxe, le mensonge deviennent vérité d’état et aboutissent à ce que le discours politique officiel soit pure fiction narrative et acceptée comme telle. On obtient alors un phénomène de « suspension consentie de l’incrédulité », sans que personne ne puisse remettre en cause cette irréalité narrée comme vérité.

Une propagande d’état que l’on a déjà connue dans tous les régimes totalitaires (URSS, 3ème reich, etc.) d’autant plus toxique qu’elle commence désormais tôt :

CONCLUSION

Notre article vient de passer, nous espérons de la façon la plus objective possible, ce phénomène majeur de propagande poutinienne lors de cette guerre en Ukraine. Phénomène qui montre que la Russie Poutinienne a basculé dans une réalité alternative caractéristique des régimes totalitaires que nous avons aussi tenté de détailler.

Le US Holocaust Memorial Museum , entre autres, a déclaré que Poutine « avait déformé et détourné l’histoire de l’Holocauste« . Une longue liste d’historiens a signé une lettre condamnant :

« l’abus cynique par le gouvernement russe du terme génocide, la mémoire de la Seconde Guerre mondiale et de l’Holocauste, et l’équation de l’État ukrainien avec le régime nazi pour justifier son agression non provoquée ».

Ils ont souligné un schéma plus large de propagande russe décrivant fréquemment les dirigeants élus de l’Ukraine comme « des nazis et des fascistes opprimant la population ethnique russe locale, qui, selon elle, doit être libérée« .

Et bien que l’Ukraine compte des extrémistes de droite, ajoutent-ils, cela ne justifie pas l’agression et la déformation de la Russie.

L’extrême droite est née du complotisme et pas le contraire. TOUS les régimes d’extrême droite/nationalistes ont bidouillé l’histoire, les sciences, les faits. Au final la propagande poutinienne est dans la droite ligne de la propagande stalinienne sur le nationalisme.

Pour Poutine qui est d’extrême droite, l’histoire c’est du « roman national ». Or un roman, on peut en changer l’histoire au fur et à mesure du temps qui passe.

2005 les nazis c’est…

2014 les nazis, c’est autre chose

Et en 2022, les nazis, c’est totalement autre chose…

Ce qui est intéressant, c’est que, à quel moment, on accepte de renoncer à juger la cohérence. En cinéma, on entend parler de « suspension consentie de l’incrédulité ». Par exemple, la SF, on accepte d’y croire, mais il faut garder des trucs plausibles. Comment les russes construisent un récit qui se contredit autant ?

Par exemple, est-ce que les Russes ont vraiment un avis là-dessus ou ont ils collectivement renoncé (parce que l’URSS, c’était quelque chose,dans le genre culture du mensonge) ? Et c’est là qu’on pourrait avoir un angle intéressant pour considérer une société comme totalitaire. On part du principe que le russe est citoyen, mais se vit-il comme ça ? Possible que non. Et quelle est la responsabilité d’un non-citoyen dans la politique de son pays ? (questions ouvertes)

Ce n’est pas délirant de poser la question. Nous avons un réflexe ethnocentriste, mais un article cité ici explique que les Ukrainiens n’ont pas fait ce travail de mémoire sur la 2ème Guerre mondiale, et en même temps, la Russie vit dans son propre récit. Quel est le notre ? Il est probablement moralement meilleur que le désir impérialiste russe, mais on peux se tromper. À un tel point de WTF, on finit par se demander si c’est pas nous qui déraillons des fois (mais en fait non).

Et c’est précisément le piège explicite tendu par les fachosphères/complosphères françaises mais aussi par ces récits alternatifs d’état -comme celui sur les « nazis » par les russes- : un fait n’est pas vrai ou faux selon eux, il est « alternatif ». En cela on confond complètement les analyses qui en sont faites et elles ne sont plus discutables. C’est la véracité du fait qui l’est. On peut ainsi aboutir à une vision épouvantable de la liberté d’expression selon les extrêmes droites et qui progresse ; liberté d’expression qui devient dès lors « 5 mn pour les juifs, 5 mn pour les nazis ».

Et le problème c’est que les russes sont bien accrochés à tous ces mythes. En sortiront ils ? Probablement pas.

Deuxième problème : c’est une maladie contagieuse. Et, probablement en partie sous l’influence de la russie, ces visions faussées se sont étendues en Europe. La constatation est qu’aujourd’hui certains regardent ces récits comme vrais, mais adoptent aussi une vision du monde ou toute réalité est bannie. Cette effrayante convergence constatable entre pro poutine, antivaxisme, multiples théories du complot trouvent leur apex dans des mouvements comme les QAnon, les Sovereign citizens, les « one nation » et tant d’autres. Une partie de la population française est désormais prête à accepter n’importe quelle théorie délirante accusant certains de nos concitoyens des pires maux : musulmans, juifs, homos, franc maçons, etc…. On a déjà connus cela.

Et on retrouve dans le récit russe (récit au sens récit national, pas fiction, encore que…), et son « antinazisme » d’aujourd’hui, les mêmes germes qui ont donné le nazisme. Le vrai. Souvenez vous de cette publication qui listait les « signe avant coureur du fascisme ». La Russie y est déjà, nous y courrons tout droit.

Et ironie suprême au nom de la lutte contre les « nazis »