Alors que l’opération de gendarmerie en cours sur la zad venait de commettre une faute aussi dramatique que prévisible, le premier réflexe du parquet comme du ministère de l’intérieur a été de dégainer au plus vite dans les médias le récit adéquat dans le but de couvrir les faits, se justifier de la mutilation de maxime et tenter de neutraliser les réactions. M. Collomb ou le procureur général s’y sont employés immédiatement de la manière la plus affirmative possible, sans la moidre décence ni le moindre regret. C’est l’usage. Au-delà des considérations générales sur la brutalité de l’opération policière en cours, de la dangerosité avérée des grenades explosives et de leur usage immodéré sur la zad ces dernières semaines, nous avons souhaité pour notre part attendre d’avoir pu croiser différents témoignages avant d’être aussi affirmatif sur les faits.
Il nous apparaît aujourd’hui que la version gouvernementale selon laquelle les gendarmes auraient lancé des grenades pour se dégager en urgence d’un groupe d’une cinquantaine de manifestant.e.s les attaquants avec des cocktails molotovs est une fiction. Les communiquant.e.s de la gendarmerie pouvaient aisément le vérifier : chacune des interventions des gendarmes sur la zone a été filmée par leurs services. D’après les témoignages que nous avons recueilli, le drame est au contraire intervenu dans un moment décrit comme calme ou quelques dizaines de personnes faisaient face de manière statique depuis environs 45 minutes aux gendarmes mobiles. Ceci alors que le déblaiement d’habitat de la chateigne était en cours derrière la ligne policière. Les gendarmes étaient alors très nombreux face à un groupe réduit de manifestant.e.s.
Un effectif de gendarmes mobiles, en embuscade est alors sorti à l’improviste de la forêt. Ils ont chargé les manifestant.e.s pour les dégager du champs et susciter un mouvement de panique. Cette charge subite a effectivement causé une fuite immédiate des personnes présentes, en direction de l’unique et étroit passage de sortie au bout du champs. C’est à ce moment là qu’une série de grenades a été lancée sur quelques personnes à la queue du groupe tentant d’échapper à la charge. Après l’explosion, plusieurs personnes se sont retournées et ont vu la victime, debout, dos aux gendarme, se tenant le poignet droit avec la main gauche. Celle-ci a ensuite été plaquée au sol et tirée plusieurs mètres plus loin. Les témoins disent avoir vu les gendarmes "nettoyer" autour de la victime, enlever les morceaux de chair et mettre de la terre sur les traces de sang.
Ce qui ressort de l’ensemble des témoignages est clair : contrairement à ce qu’ils affirment, les gendarmes ne sont pas intervenus avec des grenades explosives pour se dégager d’un groupe d’assaillant.e.s et se sortir d’une situation de danger grave, mais bien pour disperser des manifestant.e.s alors statiques et en sous-nombre d’un champs. Ceci n’a d’ailleurs malheureusement rien d’inhabituel dans cette opération policière. Au cours des dernières semaines, chacun peut témoigner que les grenades explosives GLI-F4, entre autres armes mutilantes, ont été utilisées à de multiples reprises comme simple outil de dispersion et de terreur et non pour faire face à des attaques réelles d’opposants.
Soulignons en passant que du côté même des gendarmes, les seules blessures graves dans leur rangs - à l’automne 2012 comme lors de cette nouvelle vague d’expulsion - ont été causées par un mauvais usage et l’explosion de leurs propres grenades.
Nous appelons à réagir partout pour dénoncer les mutilations causées par les armes de la police et la brutalité de l’opération toujours en cours sur la zad.
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