Shake Pint, Pub de l’Étoile, Madigan’s... à Besançon, quelques établissements n’hésitent pas à se montrer excessivement tolérants envers une clientèle pourtant clairement marquée à l’extrême-droite.
Rares sont les boîtes qui assument d’éventuelles orientations partisanes, les affaires restant liées à un grand public peu friand d’imprégnations jugées trop clivantes. Les débits de boisson plus que les autres, s’agissant de lieux censés être caractérisés par leur ouverture et leur neutralité. Mais à Besançon, quelques établissements n’hésitent pas à se montrer excessivement tolérants envers une clientèle pourtant clairement marquée à l’extrême-droite. Quitte à accueillir leurs réunions militantes, tolérer l’exhibition d’insignes néonazis, ou couvrir des agressions racistes et politiques.
Avant-propos
Ce article cible les cafés, estaminets, bars, brasseries et divers débits de boisson, qui accueillent de façon consciente, récurrente et ostensible des militants et sympathisants néonazis. Nous sommes lucides quant aux difficultés pratiques que peut entraîner la situation, aussi nous ne blâmons que la complaisance dont certain.e.s persistent à faire profiter ces individus identifiés et visibles. Une largesse accordée, pour les boîtes concernées, de longue date, malgré des agressions documentées et survenues en leurs murs, ainsi que de nombreuses alertes ignorées par leurs gérants.
Ayant peut-être pris une bière ou un café sur une des terrasses mises en cause, il est possible que vous n’ayez rien remarqué de problématique. Les menaces, nuisances et violences liées à l’extrême-droite sont effectivement encore exceptionnelles à Besançon. Et nous entendons qu’elles le restent. C’est pourquoi, nous estimons que le choix de quelques patrons de détourner le regard face à ces réalités graves et établies constitue, de fait, une validation, un appui et un encouragement à ces pratiques. Après des discussions infructueuses, nous avons donc décidé de les exposer.
Le bien-être et la sécurité des client.e.s, salarié.s., comme des tiers, ne se négocient pas. À défaut d’emporter un changement de politique par la pression et l’atteinte à l’image de marque, nous espérons informer la population pour qu’elle sache dans quel endroit elle met les pieds. Chacun.e pourra dès lors décider, de façon éclairée, si ielle veut ou non prendre attache, financer et plébisciter ces établissements. Afin de prévenir le risque d’incidents, nous alerter d’un fait, ou questionner notre démarche, nous sommes joignable via : « sos-bar_25@riseup.net. »
L’ancien « Carpe Diem » est devenu un des lieux les plus branchés pour les fans du IIIe Reich. Le 29 novembre 2019, il avait été le théâtre d’une lourde agression… impliquant un certain Sébastien Favier, dit Sanglier [1]. Malgré des excuses publiques [2], le journal « Factuel.info » avait pu démontrer que la plupart des salarié.e.s entretenaient des liens très étroits avec le milieu [3] [4]. De l’histoire ancienne ? Pas tellement. Habitués et riverains dénoncent encore régulièrement cette cohabitation forcée, dont un des derniers épisodes remonte à la soirée du 3 au 4 mai dernier.
Un voisin raconte ainsi : « Sanglier était en terrasse avec ses potes, succédant pintes sur pintes. Ça a continué comme ça jusqu’à la fermeture, vers deux heures du matin. À la fin, le type était ivre mort. Ses compères ont essayé de l’empêcher de repartir avec sa moto, garée juste à côté. En vain. Mais ça ne les a pas empêchés de coller des stickers nationalistes sur la place. » Malgré la promesse « qu’ils ne reviendraient plus », le « Shake Pint » offre donc gîte et couvert à un agresseur. Rassurant. Quant à des cas concrets de violences analogues, il n’a pas fallu attendre longtemps.
Ainsi le 30 mai suivant, un certain Pierre Slevin, sympathisant d’extrême-droite et ancien barman de la société, publiait sur les réseaux sociaux une vidéo dont l’introduction annonce : « qu’est-ce qui t’empêche d’être toi-même ? Le code pénal. » Elle se poursuit par une prise, effectuée la veille, où deux hommes discutent près du comptoir. L’un d’eux, de manière brutale, repousse l’autre très violemment, au point qu’il s’écrase sur le mobilier et le sol. Confronté à cet ensemble, l’établissement ne réagira que par le silence et la mention d’un émoticône « j’adore. » Édifiant.
Bar populaire la journée, arrière cours faf le soir. Les premières archives concernant le « pub de l’Étoile » remontent à plus de dix années, lorsque en avril 2012 une première agression a été filmée et communiquée par une bande nommée « Werwolf Sequania » [5]. Ses successeurs se manifesteront quelques années plus tard, épinglés le 20 décembre 2019 par « Factuel.info. » Outre la connivence de salarié.e.s, comme Hugo Stein et Margaux Diévart, toujours d’actualité, plusieurs néonazis, dont Sébastien Favier et Alexandre Meuret, y avaient été formellement mis en cause.
Mais lorsque le 10 janvier 2022 des accusations de « fréquentation assidue » ont à nouveau visé l’entreprise, ses tenanciers semblaient totalement découvrir la situation… pourtant, depuis plusieurs mois déjà, divers groupuscules comme « la Cocarde étudiante », « Génération Z » et autres « Vandals Besak », y ré-organisaient, sans se cacher, leurs entrevues privées et militantes. Jusqu’à revendiquer, publiquement, le lieu comme leur « quartier général » [6]. Très étonnés, qu’ils étaient les tauliers. Davantage qu’efficaces. Car, depuis, il ne s’est absolument rien passé.
Sur les derniers mois, Sébastien Favier, Alexandre Meuret, Théo Giacone et bien d’autres activistes ont été aperçus dans des dérives peu louables… notamment lors d’alcoolisations précédent des agressions d’opposants politiques, les 1er et 9 mars 2022 ; à l’occasion d’une soirée qui a dérapé en chants militaires allemands, prise à partie de passants, ainsi que collages d’autocollants sur la façade du bâtiment, le 19 mars ; jusqu’à des menaces, proférées depuis l’intérieur du site, le 14 avril suivant. Sollicités sur ces éléments préoccupants, les responsables n’ont donné aucune suite.
Ces établissements furent prisés par l’extrême-droite, mais restent encore aujourd’hui le lieu de ralliement assumé par les néonazis. La fréquentation de tels groupuscules est documentée depuis 2018, y retrouvant à cette époque les dénommés Sébastien Favier, ainsi que Teddy Mairet [7], Marc Bettoni [8] ou encore Philippe Tribout [9]. En janvier 2019 et janvier 2020 les intéressés se structurent dans ce qui deviendra les « Vandal Besak », mais n’attendent pas pour être cités par « Factuel.info » dans deux agressions racistes et politiques survenues sur le perron du bar.
Le propriétaire, André Maille, est un ancien flic. Interrogé le 11 décembre 2019, il ne trouvera rien à redire sur la situation. Pire. Dans un commentaire paru le 13 juin 2020 sur Facebook, il annoncera « ne pas être concerné par le problème, tant que cela n’a pas lieu directement chez lui. » Engagé auprès de Ludovic Fagaut (les Républicains ») aux dernières élections municipales, ses partages d’articles de « FdeSouche », de vidéos de l’ex-skinhead Philippe Vardon, ou encore de mèmes aux relents racistes, illustrent incontestablement ses tendresses ultranationalistes.
En 2022 c’est donc toujours là que les bras tendus viennent, y compris après leurs mauvais coups. Suite à l’attaque d’un meeting du NPA le 9 mars dernier place du Théâtre, c’est ici qu’Alexandre Meuret, Théo Giacone, et le reste de « Génération Zemmour » s’étaient planqués. Avant d’être rapidement cueillis par la BAC [10]. Mis devant le fait accompli, « Dédé » n’a pas hésité longtemps avant de donner ces petites frappes à ses ex-collègues. Ce qui n’empêche pas la fidélité de cette clientèle, en base arrière le 21 mai dernier afin de de parasiter la marche contre l’homophobie.