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Demain Le Grand Soir
NI DIEU, NI MAITRE, NI CHARLIE !

Le Site de Demain le Grand Soir est issu de l’émission hebdomadaire sur "Radio Béton", qui fut par le passé d’informations et de débats libertaires. L’émission s’étant désormais autonomisée (inféodé à un attelage populiste UCL37 (tendance beaufs-misogynes-virilistes-alcooliques)/gilets jaunes/sociaux-démocrates ) et, malgré la demande des anciens adhérent-es de l’association, a conservé et usurpé le nom DLGS. Heureusement, le site continue son chemin libertaire...

Le site a été attaqué et détruit par des pirates les 29 et 30 septembre 2014 au lendemain de la publication de l’avis de dissolution du groupe fasciste "Vox Populi".

Il renaît ce mardi 27 octobre 2014 de ses cendres.

" En devenant anarchistes, nous déclarons la guerre à tout ce flot de tromperie, de ruse, d’exploitation, de dépravation, de vice, d’inégalité en un mot - qu’elles ont déversé dans les coeurs de nous tous. Nous déclarons la guerre à leur manière d’agir, à leur manière de penser. Le gouverné, le trompé, l’exploité, et ainsi de suite, blessent avant tout nos sentiments d’égalité.
(....)Une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise - une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, contre le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte c’est la vie d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais. "

Piotr Kropotkine -

Brassens, la chanson d’un gars qui tourne mal, “les deux oncles”
Article mis en ligne le 26 août 2022
dernière modification le 20 août 2022

par siksatnam

Article d’André Calvès 1964

Publié avec l’aimable autorisation de son fils, Michel Calvès (à l’occasion de la mise en ligne de quelques documents du fonds d’archives Jean-René Chauvin)

Brassens “LES DEUX ONCLES”

Il existe bien sûr une idéologie anarchiste. Il existe surtout un état d’âme. Et c’est assez logique car il faudrait de l’audace pour tenter de ligoter un anarchiste avec une idéologie. C’est un homme libre, que diable !

Hélas, libre ou pas, il vieillit. Tout le monde vieillit naturellement. Mais l’idéologue qui prend de la bouteille, du fric et de la frousse, se trouve souvent gêné quand il songe à ses positions politiques passées. L’anarchiste ne peut éprouver cette sorte de gêne. L’état d’âme varie et c’est tout.

Connaissez vous le dernier chant de Brassens sur ses deux oncles “Celui qui aimait le Tommy et celui qui aimait le Teuton” ?

A la vérité, il n’est pas tellement question de Tommy ni de Teuton. Il est question de la connerie qui consiste à lutter et mourir pour des idées.

Il est question de renvoyer dos à dos la collaboration et l’épuration.

Tout ça, c’étaient des foutaises.

Il coule de source que l’on peut aussi renvoyer dos à dos, le maquisard et le S.S. Car voila bien les deux oncles dont il est question.

Renvoyons dos à dos le para et le fellaga, le CRS et l’ouvrier.

Nous y sommes camarades ? Cette première étape est franchie ? Ils sont tous dos à dos ?

Très bien, progressons. le seul imbécile, c’est celui qui “lutte pour des idées”. Mais celui qui lutte pour des idées, c’est celui qui n’a rien.

L’autre lutte pour la campagne double, pour les annuités et pour la maison de santé des gardiens de la paix. C’est un réaliste. Personne ne soupçonnera le para de métier de lutter pour des idées.

Il nous reste donc un imbécile. C’est l’opprimé .

Pauvre Brassens,voila qu’il risque de se faire applaudir par ces flics qu’il déteste.

En effet, c’est cent fois, c’est mille fois que dans un commissariat, des grévistes matraqués ont entendu les flics ironiser sur les idiots qui luttent pour des idées.
En écoutant le dernier chant de Brassens,le bon vieux flic a du sourire heureux… et justifié, lui qui portait la francisque de Pétain en Juillet 44 et la Croix de Lorraine au mois d’Août. Voila un gars qui n’est pas un “oncle” stupide. C’est un flic.

Ceci dit,et dans tous les cas, ce pauvre Brassens se trompe énormément.

Tous les imbéciles à idées qui revinrent des camps de la mort,vous diront que, pour un idéaliste, ils ont vu périr cinquante gros malins qui se foutaient de la politique… et qui furent raflés à la sortie d’un cinéma… et, des fois même, sur un banc public en dépit de leur petite gueule bien sympathique.

Et tous ces citoyens qui auraient dû avoir la philosophie du sage qui trépasse par pur accident, se lamentaient au contraire plus fort que n’importe quel politique, tout comme le juge qui n’aurait jamais dû… logiquement, se faire prendre par un gorille.

Or,cette histoire n’est pas vieille. Elle se déroule un peu partout, au Vietnam,au Congo et au Guatemala.

Si la France se trouve demain à l’heure du Viêtnam, Brassens ne sera certes pas dans la cruelle situation du mineur ou du métallo qui compte ses quatre sous… et doit lutter pour ses idées.

Toutefois, attention. Le tonton nazi n’apprécie pas du tout le vieux répertoire de Brassens.

Brassens devra donc renoncer à quelques idées afin de pouvoir vivre.

Mais n’a-t’il pas déjà commencé ?

Oui et non. Le Brassens d’aujourd’hui n’est pas fondamentalement différent de celui d’hier. Il n’a trahi aucune idéologie. Son état d’âme varie seulement un peu. Mais voila déjà qu’il n’est plus le même.

Cher Brassens, je crois sincèrement que tu vivras aussi vieux que Villon. Je crois que le mouvement ouvrier a besoin du marché de Brive la Gaillarde et même des sabots d’Hélène.

Mais je crois aussi que tu devrais te méfier d’un oncle qui ne s’habille jamais qu’en civil, mais qui circule dans les rangs des pauvres en leur répétant “à quoi ça sert ?”

André Calvés