Demain Le Grand Soir
NI DIEU, NI MAITRE, NI CHARLIE !

Le Site de Demain le Grand Soir est issu de l’émission hebdomadaire sur "Radio Béton", qui fut par le passé d’informations et de débats libertaires. L’émission s’étant désormais autonomisée (inféodé à un attelage populiste UCL37 (tendance beaufs-misogynes-virilistes-alcooliques)/gilets jaunes/sociaux-démocrates ) et, malgré la demande des anciens adhérent-es de l’association, a conservé et usurpé le nom DLGS. Heureusement, le site continue son chemin libertaire...

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Il renaît ce mardi 27 octobre 2014 de ses cendres.

" En devenant anarchistes, nous déclarons la guerre à tout ce flot de tromperie, de ruse, d’exploitation, de dépravation, de vice, d’inégalité en un mot - qu’elles ont déversé dans les coeurs de nous tous. Nous déclarons la guerre à leur manière d’agir, à leur manière de penser. Le gouverné, le trompé, l’exploité, et ainsi de suite, blessent avant tout nos sentiments d’égalité.
(....)Une fois que tu auras vu une iniquité et que tu l’auras comprise - une iniquité dans la vie, un mensonge dans la science, ou une souffrance imposée par un autre -, révolte-toi contre l’iniquité, contre le mensonge et l’injustice. Lutte ! La lutte c’est la vie d’autant plus intense que la lutte sera plus vive. Et alors tu auras vécu, et pour quelques heures de cette vie tu ne donneras pas des années de végétation dans la pourriture du marais. "

Piotr Kropotkine -

Crise climatique : un Macron, ça ose tout et c’est même à ça qu’on le reconnaît
Article mis en ligne le 11 janvier 2023
dernière modification le 8 janvier 2023

par siksatnam

À entendre le discours de nouvel an de Macron, c’est cette phrase de Michel Audiard qui vient à l’esprit, à propos de ceux qui « osent tout et c’est même à cela qu’on les reconnaît ».

Au milieu d’un festival d’autosatisfaction et de propagande sur les réformes, une phrase émerge, la seule dans tout le discours qui fasse allusion à la crise climatique : « Qui aurait pu prédire la vague d’inflation ainsi déclenchée et la crise climatique aux effets spectaculaires encore cet été dans notre pays ? » Comment, c’est lui qui a créé en 2018 le Haut Conseil pour le climat et il ne savait pas ? Il était présent en 2013 lorsque Jean Jouzel a présenté à l’Elysée les conclusions du cinquième rapport et il ne savait pas ? Il a lui-même invité Valérie Masson-Delmotte à l’Elysée et il ne savait pas ? Le Haut conseil pour le climat avertit en 2021 que « Les deux tiers de la population française sont déjà fortement ou très fortement exposés au risque climatique » et il ne savait toujours pas ? Une membre du haut-conseil pour le climat parle de "Fake News", ce qui est un euphémisme pour dire "mensonge". Christophe Cassou, principal auteur du dernier rapport du GIEC, commente : « À quoi servent nos travaux si en public, devant les millions de Français, les dirigeants, qui fixent le cap de l’action climatique, accréditent le "on ne savait pas", si chers aux partisans de l’inaction et du statu quo ? » Le plus étonnant, c’est que les conséquences d’une telle déclaration étaient prévisibles et, pourtant, aucun des bras cassés qui composent son équipe de communication ne l’a mis en garde sur l’effet de son discours. A défaut d’être capable lui-même d’anticiper l’effet d’une telle phrase, Macron n’est-il donc entouré que de flagorneurs incapables de l’éclairer sur la portée des paroles qu’il prononce ?

On imagine les réactions diverses qu’a pu susciter cette phrase du côté des scientifiques. L’un d’eux raille : “Qui aurait pu prédire la crise climatique ?” C’est amusant, c’est exactement une de mes boutades préférées pour moquer les politiciens qui vivent hors du réel ». Pour Mathieu Auzanneau, directeur du Shift Project, ce n’est pas seulement un propos hors-sol, mais une véritable provocation à l’égard de ceux qui travaillent depuis des décennies sur le sujet : Le protocole de Kyoto date de 1997, Jacques Chirac a parlé de “notre maison qui brûle” il y a plus de vingt ans… Il faut être totalement inconséquent pour écrire, puis prononcer ce genre de phrases." Et pour Mathieu Auzanneau, la vague d’inflation ainsi déclenchée est aussi la conséquence de la raréfaction des ressources, déjà prédite par les modèles mathématiques du rapport Meadows il y a... plus de cinquante ans. Et il conclut par ce constat lamentable : "Cela veut dire que la personne la mieux informée de France ne comprend pas les ressorts structurels de ces crises qui sont toutes liées et ne sont pas conjoncturelles. Il se paie de mots, agit en tacticien et pas en stratège. »

Mais Macron est-il réellement la personne la mieux informée de France ? Les entreprises du secteur énergétique ont compris bien avant la création du GIEC (1988) et en ont anticipé les conséquences à leur manière, selon leurs méthodes, et dans leur intérêt, à l’exemple de Total Energies. Trois chercheurs ont épluché les archives du groupe et ont mis à jour une information édifiante : c’est depuis 1971 que les effets de l’industrie pétrolière sur l’environnement sont connus de ses dirigeants. Dans un numéro spécial consacré à l’environnement, un chercheur alerte sur les conséquences catastrophiques d’un réchauffement lié aux activités humaines. Selon l’historien des sciences Christophe Bonneuil, on a "minimisé la gravité du problème, jeté des doutes sur son origine humaine, et entré dans ce que les historiens et sociologues appellent "la fabrique du doute"". Ainsi, ce que Macron prétend découvrir maintenant était connu des pétroliers depuis plus de cinquante ans. Pour protéger leurs intérêts, les compagnies pétrolières ont mis en place une campagne de dénigrement systématique des informations scientifiques, de lobying et auraient même été jusqu’à soudoyer des "chercheurs-espions" à leur solde pour anticiper les travaux universitaires. Et ces "marchands de doute" ont réussi à anesthésier l’opinion publique pendant des décennies, au point de pouvoir continuer une activité d’extraction écocide en totale contradiction avec les accords de Paris.

Macron ne manque pas de courtisans serviles pour décrypter ce discours de nouvel an dans le but de justifier l’injustifiable : ainsi Pascal Canfin, écologiste ayant viré sa cuti au profit du macronisme. Il nous fait grâce, cette fois-ci de l’excuse classique de "la phrase retirée de son contexte", mais c’est pour nous dire "Cela peut être vu par certains comme maladroit. Il a voulu exprimer ce que certains français ont ressenti, c’est-à-dire une accélération de phénomènes que même certains scientifiques n’avaient pas envisagée". Mais c’est précisément le reproche qu’on peut lui faire : être à la tête d’un état et ne pas avoir prévu que les choix faits maintenant engagent pour des décennies. N’avoir pas envisagé, malgré les rapports du GIEC unanimes à dénoncer l’urgence de la situation, que les phénomènes pouvaient aller plus vite que prévu. Agir comme si l’objectif de neutralité carbone à l’horizon 2050 nous laissait encore 27 ans, alors que les options prises maintenant sur l’acquisition d’équipements (avions, voitures, etc.) figent les émissions de CO2 correspondantes pour la durée de leur vie. Avoir remis à demain les mesures à prendre aujourd’hui sans tenir compte des rapports du GIEC, unanimes à dénoncer l’urgence de la situation. Les politiques du monde entier n’entendent rien, ne comprennent rien, ne prévoient rien et, en plus, Macron s’en vante !

Et aussi il cherche à museler les associations qui, en réponse à l’inertie gouvernementale, pratiquent la désobeissance civile : les manipulations sémantiques gouvernementales qualifient leurs militants "d’écoterroristes", ce qui est une manière d’ignorer le message qu’ils portent et une justification pour les réprimer. La loi "séparatisme" ouvre la voie aux dissolutions arbitraires et certains amendements présentés pour le budget 2023 ne sont rien d’autre qu’une tentative d’asphyxier les associations environnementales sur le plan financier. Pourtant, la politique de lobbying qui a, entre autres, obtenu le détricotage complet des propositions de la Convention Citoyenne pour le climat est une négation de la démocratie. Il est intolérable que ce soient quelques entreprises capitalistes qui programment la destruction du monde et la fin de l’Humanité, avec la complicité d’élus plus ou moins vénaux. Et le contrepoids des associations citoyennes ne serait pas de trop pour un rééquilibrage des influences.

Pierre Sassier