Le 23 mai, environ 150 manifestants « autonomes » avaient défilé à Lille et Lambersart.
Une vidéo a été diffusée sur internet par la Maison flamande de Lambersart. Dedans figuraient des informations confidentielles sur les 26 interpellés du 23 mai lors d’une manif d’« autonomes ». Comment ces données ont-elles été obtenues ? Une plainte a été déposée.
L’affaire soulève des questions. Avec une chronologie et des éléments troublants. Petit rappel. Le 23 mai, une manifestation anarchiste-autonome contre la « répression d’État » se déroule à Lille. Elle se termine devant la Maison flamande de Lambersart. Un lieu, fondé par Jeunesse identitaire et Terre celtique, qui fait polémique depuis son ouverture en 2008 à propos de liens supposés avec des groupes d’extrême droite. Son portail est dégradé. Vingt-six manifestants sont placés en garde à vue. Seuls quelques-uns sont poursuivis.
Les bisbilles, elles, ont continué entre extrêmes de gauche et de droite. Comme le 3 juin, lors d’une soirée à la fac de Lille II. Selon trois membres du milieu autonome, une vive discussion s’est engagée avec un individu, qui aurait affirmé « avoir en sa possession les noms et adresses des personnes interpellées le 23 mai » et proféré « des menaces de mort ». Il aurait aussi indiqué « prendre fréquemment des verres avec des policiers ». Et aurait fait « le salut nazi », qualifiant les anarchistes de « Bisounours ».
Le 9 juin, sur YouTube, une vidéo est diffusée par la Maison flamande. Un montage de photos montre notamment des images des incidents du 23 mai. Beaucoup plus surprenant, des remerciements finaux ironiques sont adressés aux 26 interpellés, dont des coordonnées défilent à l’écran : prénom, première lettre du nom et ville de chacun ! Parmi ces communes, le petit village italien, « inconnu des autres manifestants », donné aux policiers par une jeune femme originaire d’Italie mais vivant en Belgique. Le tout, sur fond musical des Bisounours. Comment ces données confidentielles ont-elles été obtenues ? Y a-t-il eu des fuites ? Un dépôt de plainte de la Maison flamande a-t-elle permis un accès au(x) dossier(s) ? : « Ce qui est grave, c’est que des groupes privés fascistes arrivent à se procurer des informations personnelles aussi précises que seule la police (ou la justice) peut détenir. Nous aimerions savoir qui les a divulguées », explique Sébastien (prénom modifié) , militant d’extrême gauche. De plus, ont-elles servi à l’agression d’une « autonome » ? (lire ci-contre). Selon Sébastien, l’ensemble de ces faits depuis le 23 mai sont « liés ».
Une plainte contre X a été envoyée vendredi au procureur et au préfet pour « avoir divulgué ou s’être procuré illégalement des informations personnelles ». Les sept plaignants ont joint la vidéo incriminée, retirée au bout de quelques jours du site mais téléchargée, et des témoignages. Pas de preuves, mais des interrogations auxquelles la justice apportera peut-être une réponse. •
La Maison flamande n’a pas voulu réagir. Le parquet était hier injoignable.
PAR BENJAMIN DUTHOIT
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