
De lui, on connaît : "La propriété, c’est le vol". Marx l’a réduit à la figure de petit bourgeois. L’habitude l’a rangé parmi les ancêtres de l’anarchie. Pendant la révolution de 1848, comme député et journaliste, Proudhon était le plus populaire des socialistes. Aujourd’hui on le redécouvre.
La révolution de 1848 a été une révolution populaire dans laquelle les ouvriers ont pris la parole et tenté de s’organiser. Les clubs politiques, les coopératives ont proliféré. Proudhon avec le mutuellisme et les coopératives aux mains des ouvriers avait les idées que défendait le peuple à cette époque. Rendu célèbre par son livre sur la propriété et son journal, "Le Peuple", il a cru qu’il était l’homme du moment.
Sa vie avait déjà été intense : né pauvre dans un faubourg de Besançon, il a commencé sa carrière comme conducteur de bœufs à l’âge de 8 ans, puis ouvrier pour aider son père endetté. Ses talents ont été découverts tardivement. Doté d’une bourse, il a étudié avec frénésie pour exercer tous les métiers : typographe, bachelier à 29 ans, patron d’imprimerie, patron ruiné, avocat d’affaires d’une société de bateliers, philologue puis économiste.
Élu député, il s’en est pris aux représentants qui ne représentent qu’eux-même et se réfugient à la Chambre dans un "isoloir". Il refuse l’élection d’un président au suffrage universel, qui serait un nouveau monarque, en plus puissant. Sa tentative de détruire la propriété du capital au Parlement a été une déroute : il était seul contre tous. Son grand projet, faire la révolution par la "Banque du Peuple", a fait banqueroute. Mais aujourd’hui les SEL et les monnaies locales reprennent son idée d’une banque qui prête sans intérêt, les mutuelles se sont développées, quoique loin de son projet.
Pendant plus d’un siècle, Proudhon, ce fils du peuple, père de l’anarchie, frère ennemi des communistes, a été enterré. Depuis peu des universitaires et des étudiants le relisent. Une poignée de jeunes syndicalistes et quelques militants le pratiquent. Des marxistes le réhabilitent.
Par Louis-Laurent Grandadam. Réalisation : Yvon Croizier Mixage : Yvon Croizier. Archives INA : Arnaud Plançon. Liens internet : Annelise Signoret