
1) C’est un drame humain. Au moins 6 500 travailleurs étrangers sont morts ces 10 dernières années au Qatar selon le Guardian. Au regard des chiffres dont nous disposons aujourd’hui, jamais une coupe du monde n’aurait été aussi meurtrière.
De nombreuses ONG dénoncent des conditions de travail intenables pour construire les stades et autres infrastructures, Amnesty International décrit des "violations massives des droits humains" et a documenté des traitements inacceptables : des "camps de travail", des passeports confisqués et des abus physiques et sexuels, jusqu’aux décès.
Il y a aussi des dizaines d’enquêtes journalistiques sur le sujet. Les témoignages pleuvent : aucun doute possible aujourd’hui sur les terribles conditions de travail des ouvriers au Qatar.
2) C’est une catastrophe environnementale. Les matchs se dérouleront dans d’immenses stades (éphémères !) climatisés à ciel ouvert en plein désert. Le bilan écologique de tels évènements est toujours dramatique, mais là, ça dépasse l’entendement.
La coupe émettrait 3,6 millions de tonnes de CO2 d’après la FIFA mais ce chiffre est sérieusement sous-évalué selon l’ONG Carbon Market Watch.
C’est principalement dû aux trajets en avion des supporters. Contrairement aux précédentes compétitions en Russie ou au Brésil, tous les matchs auront lieu dans une seule ville – Doha. Problème de taille : il n’y a pas assez de place pour y héberger tout le monde. Résultat : bon nombre de supporters feront des allers-retours en avion entre les matchs. Au moins 160 vols quotidiens sont donc prévus avec les pays alentours (soit un vol toutes les 10 minutes).
Paloma Moritz a démonté point par point tout l’argumentaire du Qatar qui ose affirmer que cette coupe est « neutre en carbone ». Un cas de greenwashing éhonté.
3) L’évènement est aussi teinté de soupçons de corruption, au point que des enquêtes judiciaires ont été ouvertes dans 3 pays, et que la justice américaine a conclu qu’il y avait bien eu de la corruption dans l’attribution de la coupe au Qatar.
Là encore, ce n’est pas la documentation qui manque ! Le Monde a publié plusieurs articles sur ces rebondissement judiciaires, Mediapart y a carrément dédié une page entière de son site, quand Blast le souffle de l’info a multiplié les articles à ce sujet depuis plus d’un an.
Enfin, ne l’oublions pas, on parle bien d’un pays qui a demandé aux supporters homosexuels de faire profil bas. Le Qatar réprime les droits des personnes LGBT et punit les relations sexuelles entre personnes de même sexe d’une peine pouvant aller jusqu’à 7 ans de prison.
Alors, faut-il boycotter cet événement ?
J. Latta, journaliste sportif au Monde résume ainsi la situation qui "laisse beaucoup d’entre nous devant un sinistre dilemme : ne pas voir le problème ou ne pas voir la Coupe du monde." A chacun, désormais, de décider en toute connaissance de cause.
Salomé Saqué