
David Graeber & David Wengrow
(2021, éd.Les liens qui libèrent)
iBouquin :
https://mega.nz/file/ZJIxzChI#RaK5HRLqZCmg7u6FpwGYpt8lrpjiJY_IWi9_KAkvLuc
AudioBouquin (Merci Harold Perkowski) :
https://mega.nz/file/HUwhXJ4C#tBpC1Vo6Xohz99OyoQ2gDrgVr8z9w-GnS5nwjFSaIno
Depuis des siècles, nous nous racontons sur les origines des sociétés humaines et des inégalités sociales une histoire très simple. Pendant l’essentiel de leur existence sur terre, les êtres humains auraient vécu au sein de petits clans de chasseurs-cueilleurs. Puis l’agriculture aurait fait son entrée, et avec elle la propriété privée. Enfin seraient nées les villes, marquant l’apparition non seulement de la civilisation, mais aussi des guerres, de la bureaucratie, du patriarcat et de l’esclavage.
Ce récit pose un gros problème : il est faux.
David Graeber et David Wengrow se sont donné pour objectif de « jeter les bases d’une nouvelle histoire du monde ». Le temps d’un voyage fascinant, ils nous invitent à nous débarrasser de notre carcan conceptuel et à tenter de comprendre quelles sociétés nos ancêtres cherchaient à créer.
Foisonnant d’érudition, s’appuyant sur des recherches novatrices, leur ouvrage dévoile un passé humain infiniment plus intéressant que nele suggèrent les lectures conventionnelles. Il élargit surtout nos horizons dans le présent, en montrant qu’il est toujours possible de réinventer nos libertés et nos modes d’organisation sociale.
Avant-propos par David Wengrow
David Rolfe Graeber est mort le 2 septembre 2020 à l’âge de 59 ans. Un peu plus de trois semaines auparavant, nous avions achevé la rédaction de ce livre, qui nous avait occupés pendant plus de dix ans.
Le projet avait commencé comme une sorte de récréation au milieu de nos charges universitaires plus « sérieuses » – une expérience quasi ludique où lui, anthropologue, et moi, archéologue, tentions de reproduire le genre de grand débat historique qui avait longtemps dominé nos disciplines, mais en nous appuyant sur des données récentes. Nous n’avions ni règles ni échéances. Nous écrivions comme cela nous plaisait et quand cela nous plaisait, ce qui signifiait, de plus en plus, quotidiennement. Les dernières années, tandis que nos recherches prenaient de l’élan, il n’était pas rare que nous nous parlions deux ou trois fois par jour. Bien souvent, nous ne savions plus lequel de nous deux avait avancé telle ou telle idée, proposé tel ou tel exemple ; tout était versé dans les « archives », dont nous comprîmes vite qu’elles contenaient la matière de plus d’un seul volume.
Le résultat n’est pas un patchwork, mais une véritable synthèse. Progressivement, nous avons senti que nos manières de penser et nos styles respectifs se rejoignaient en un flot unique. Peu pressés de mettre fin au voyage intellectuel dans lequel nous nous étions embarqués et conscients que beaucoup des concepts introduits dans ces pages méritaient de plus amples développements et illustrations, nous avions l’intention d’écrire des suites – pas moins de trois.
Mais il fallait bien que ce premier volume s’arrête quelque part. Jusqu’au point final, nous avons continué de dialoguer, de nous renvoyer l’un à l’autre des versions successives, de lire, partager et commenter nos sources, souvent jusqu’aux petites heures du matin. Et puis, le 6 août 2020, à 21 h 18, avec son sens inimitable de la formule (et en citant librement Jim Morrison), David Graeber a annoncé sur Twitter que nous avions fini : « My brain feels bruised with numb surprise » (« Mon cerveau est tout endolori de stupéfaction engourdie »).
David était bien plus qu’un anthropologue. C’était un militant, un intellectuel public de renommée internationale qui essayait de mettre en pratique sa conception de la justice sociale et de la libération, redonnant ainsi espoir aux opprimés. Son exemple a inspiré d’innombrables personnes à travers le monde. C’est avec toute mon affection que je dédie ce livre à la mémoire de David Graeber (1961-2020), ainsi qu’à celle de ses parents, Ruth Rubinstein Graeber (1917-2006) et Kenneth Graeber (1914-1996), comme il le souhaitait. Qu’ils reposent ensemble en paix.