
Avant les Jeux de Berlin de 1936, elle a traversé la Yougoslavie, l’Autriche et la Tchécoslovaquie, trois États que l’Allemagne envahira durant la Seconde Guerre mondiale.
Mardi 16 avril, la torche olympique des Jeux de Paris sera allumée dans le sanctuaire d’Olympie (Grèce) au cours d’une cérémonie inspirée des rites antiques. Des prêtresses d’Héra procéderont à l’allumage d’une flamme se voulant la plus pure possible, obtenue grâce à la réflexion des rayons du Soleil au centre d’un miroir parabolique. Cela marquera le début d’un périple d’une centaine de jours, relais durant lequel la flamme olympique traversera les territoires français jusqu’à son arrivée dans la capitale, prévue le 26 juillet à l’occasion de la cérémonie d’ouverture.
Ni la flamme olympique, ni son traditionnel relais n’existaient au temps des Jeux de l’Antiquité. L’une des manifestations se rapprochant le plus de ce rituel moderne était des courses de flambeau dénommées « lampadédromies », organisées en l’honneur de certaines divinités lors de festivités religieuses célébrées en Grèce antique.
À Athènes, notamment, on pouvait assister à ces lampadédromies lors des Prométhéennes. Ces célébrations honoraient le Titan Prométhée, connu pour son don du feu aux humains après l’avoir dérobé au sommet de l’Olympe. Quatre ou cinq tribus composées d’une quarantaine de relayeurs se faisaient face. Torche à la main, le premier coureur à arriver au pied de l’autel de Prométhée avait l’honneur d’allumer le feu sacré.
Organisées dans diverses cités grecques, ces lampadédromies n’ont jamais été associées à aucun concours panhellénique, y compris les Jeux olympiques. Le relais de la torche olympique n’existait pas, la seule allusion au feu étant cette flamme brûlant en permanence sur l’autel du temple d’Héra, situé au cœur du sanctuaire d’Olympie.
L’histoire moderne de la flamme olympique ne débute qu’en 1928, à l’occasion de la cérémonie d’ouverture des Jeux d’Amsterdam. En hommage au feu sacré présent durant l’Antiquité sur l’Héraion d’Olympie, les organisateurs procédèrent à l’allumage d’une flamme destinée à brûler tout au long de l’olympiade.
Un outil de propagande nazie
Huit années plus tard, en amont des Jeux de Berlin de 1936, l’Allemagne ajoutait le relais de la flamme olympique. Une idée émise par le secrétaire général du Comité olympique allemand Carl Diem, s’inspirant sans doute des lampadédromies organisées en Grèce antique.
Joseph Goebbels, ministre de la Propagande du Troisième Reich, vit en ce relais un nouveau levier culturel à mettre au service de la propagande nazie. Un rituel s’inscrivant parfaitement dans une vaste politique de réappropriation des codes de l’Antiquité gréco-romaine, afin de promouvoir l’idéologie national-socialiste en créant des ponts historiques entre ces deux époques.
Le jour de la cérémonie d’ouverture, le comité d’organisation offrait à Fritz Schilgen les honneurs du dernier relayeur. Il s’agissait d’un athlète allemand spécialiste des épreuves de demi-fond, choisi avant tout pour ses yeux bleus, ses cheveux blonds et sa foulée élégante, plutôt que ses performances sportives. Bien qu’il ne fût guère rattaché au régime nazi ni jamais invité à participer aux Jeux olympiques, il répondait aux critères de la jeunesse allemande idéalisée par Adolf Hitler : élégante, sportive et combattive.
En dépit de ses sombres origines, le relais de la flamme n’a jamais disparu des rites olympiques modernes. Cette manifestation fut reconduite dès les Jeux suivants, organisés au lendemain de la guerre, en 1948 à Londres. Né comme un outil de propagande au service de l’idéologie nazie, le relais olympique se muait, dès lors, en un symbole de paix et d’union internationale.